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leurs formes peuvent aussi se distinguer par leurs degrés. Dans les cas typiques, elles sont complètes et portent sur toutes les forme et tous les degrés du mouvement supprimé. Dans beaucoup de cas elles sont incomplètes et semblent ne porter que sur une partie du mouvement. Ainsi, dans l’amyosthénie, le mouvement atteint s’exécute encore en partie, mais avec lenteur et avec faiblesse. Ce qui est supprimé, c’est la forme vive, énergique du même mouvement ou, si l’on préfère, ce qui est supprimé, c’est le phénomène de l’effort appliqué à ce même mouvement.

Une forme très curieuse de ces paralysies incomplètes est celle à laquelle j’ai proposé autrefois de donner le nom de syndrome de Laségue[1]. Quoique Laségue en ait donné l’analyse la plus précise, le fait était déjà signalé autrefois comme une curiosité. L’une des premières descriptions est celle de Charles Bell en 1850 : « Une mère nourrissant son enfant, disait-il est atteinte de paralysie; elle perd la puissance musculaire d’un côté du corps et en même temps la sensibilité de l’autre côté. Circonstance étrange et vraiment alarmante, cette femme ne pouvait tenir son enfant au sein avec le bras qui avait conservé la puissance musculaire qu’à la condition de le regarder sans cesse. Si les objets environnants venaient à distraire son attention de la position de son bras, ses muscles se relâchaient peu à peu et l’enfant était en danger de tomber ». Beaucoup d’auteurs comme Trousseau, Jaccoud, Landry, Briquet et surtout Laségue en 1864, ont examiné des cas de cette singulière affection qui semblait être une énigme médico-psychologique. Ces sujets avaient très bien conservé le mouvement tant qu’ils regardaient leurs membres, mais ils devenaient paralysés dès qu’ils ne pouvaient plus les voir. Il en résulte qu’ils étaient

  1. État mental des hystériques, stigmates mentaux, 1893, I, p. 174.