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piano. Mais ici encore il faut qu’à la fatigue se joigne l’état émotionnel, comme dans la célèbre observation de Féré. Une jeune fille qui travaillait à apprendre un morceau de piano a présenté subitement une paralysie de la main droite au moment où elle devait jouer son morceau dans une cérémonie. La part de l’émotion est si grande qu’elle peut agir seule et s’ajouter à une fatigue purement imaginaire, comme dans cette autre observation de Féré. Une jeune fille rêve la nuit qu’elle est poursuivie par un individu et qu’elle court très fort dans les rues de Paris pour lui échapper, elle rêve qu’elle est épuisée de fatigue quoiqu’elle n’ait point bougé : le lendemain elle n’en est pas moins paraplégique. Enfin, il y a des paralysies qui s’installent à la suite de somnambulismes et de crises d’agitation motrice; mais, comme nous le verrons plus tard, elles portent sur des membres qui ont été autrefois paralysés, qui présentaient déjà d’autres troubles hystériques du mouvement, ou qui avaient en eux des causes d’affaiblissement, déformations rachitiques, anciennes cicatrices, varices, etc., ce qui produit la localisation de la névrose.

Ces paralysies ainsi déterminées peuvent être très diverses : une des formes les plus curieuses et les plus intéressantes au point de vue psychologique est celle que l’on connaît sous le nom de paralysie systématique, parce qu’elle porte sur une fonction, sur un acte, plutôt que sur un membre tout entier. Plusieurs auteurs dont les premiers furent Jaccoud, Charcot, Blecq, Séglas, avaient signalé une forme de paralysie hystérique très singulière et au premier abord peu intelligible. Il s’agissait de sujets, le plus souvent de jeunes gens, qui semblaient ne pas avoir la moindre paralysie des jambes, quand on les examinait dans leur lit : non seulement les réflexes étaient intacts, mais les mouvements eux-mêmes paraissaient parfaitement conservés. Si on leur demandait