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qui ne se doutent même pas, comme la petite Mel…, qu’elle continue à faire avec son bras et sa jambe droite les mouvements de son métier. C’est là qu’on verra ces malades qui viennent se plaindre de toute autre chose et qui interprètent très mal leur propre chorée. On se souvient de cette malade qui venait se plaindre d’un vertige quand elle sautait elle-même dans la rue au moment où elle rêvait qu’elle se jetait à la Seine. On retrouve la souvenir de ces idées dans ces délires, des somnambulismes, tandis qu’elles ne paraissaient pas exister pendant la veille. Le psychasténique, au contraire, connaît mieux que personne ses manies mentales de précision, son besoin de vérifier si sa tête est sur ses épaules, son besoin de perfectionner ou sa manie des pactes, et c’est lui qui redressera sur ce point le diagnostic du médecin. En un mot, il y a chez lui une conscience complète du trouble qui n’existe pas chez l’hystérique.

Peut-on dire cependant que la fonction qui est ainsi agitée soit chez lui tout à fait complète et normale au point de vue psychologique? En aucune façon, mais les troubles qu’elle présente ne sont pas les mêmes que dans l’hystérie. Le sujet a à son propos des sentiments pathologiques que nous connaissons déjà; il a un sentiment d’incapacité, de gêne, dans la direction de cette fonction : « Je ne suis plus maître de mon bras, de ma figure; il me semble que je ne puis en faire ce que je veux ». Il a surtout perdu ce sentiment de possession, de pouvoir libre que nous avons à propos de nos mouvements : « Dans cet état atroce, il faut que j’agisse en sentant que j’agis, mais sans le vouloir. Quelque chose qui ne paraît pas résider en moi me pousse à continuer et je ne puis pas me rendre compte que j’agis réellement; … il me semble que ce n’est pas moi qui veux les actions faites par mes