Page:Janet - Le cerveau et la pensee, 1867.djvu/91

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

sommeil change les conditions de la pensée, que la catalepsie produit des états intellectuels anormaux. En outre, parmi les causes de la folie que l’on appelle des causes morales, il en est qui certainement n’agissent sur l’esprit que par l’intermédiaire des organes par exemple, l’abus des boissons, le libertinage, ne causent la folie qu’après avoir altéré l’organisme. Eh bien ! n’est-il pas rationnel de conclure de ces faits, si connus et si positifs, à ceux qui le sont moins ? Nous sommes sûrs que, dans certains cas, la folie dérive d’une cause physique et se lie à un désordre de l’organisation pourquoi n’en serait-il pas de même dans tous les cas ?

Cela peut être, sans aucun doute ; mais cela est-il ? Voilà la question. On ne peut contester qu’il n’y ait des cas où le désordre intellectuel a sa cause dans quelque désordre organique en vertu des lois de l’union de l’âme et du corps ; n’y en a-t-il pas d’autres aussi où il semble que le trouble soit exclusivement moral, et où l’organisme n’intervient qu’incidemment et subsidiairement : par exemple, lorsque la folie est causée, ce qui est très-fréquent, par des chagrins domestiques, un amour contrarié, une ambition déçue, des scrupules religieux portés à l’excès. Qui pourrait nier alors que le trouble initial ne soit dans l’ordre moral ? C’est là qu’il se produit, qu’il continue, qu’il s’étend, qu’il s’invétère, qu’il devient incurable. Il n’est pas besoin de faire