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peut, dans certaines conditions, disparaître à nos sens et cesser d’être sentie comme chaleur ; alors il se passe en dehors de nous un autre phénomène, qui est précisément l’équivalent de la chaleur perdue, à savoir, un phénomène de mouvement. La machine qui absorbe une certaine quantité de chaleur produit une certaine quantité de mouvement, et dans tous les cas ces deux quantités sont égales. En un mot, une même cause peut, selon les circonstances, produire tantôt la sensation de chaleur sur un sujet sentant, tantôt un phénomène de mouvement dans un corps qui ne sent pas. Tout ce qui résulterait de là, ce serait donc qu’une même cause peut produire sur deux substances différentes deux effets différents, mais non pas que cette cause puisse se transformer en autre chose qu’elle-même et devenir ce qu’elle ne serait pas. On ne peut donc rien conclure de là en faveur de la transformation du mouvement en pensée.

Il y a plus : la chaleur elle-même, en tant que chaleur, n’est déjà, suivant l’hypothèse la plus répandue, qu’un phénomène de mouvement, et les physiciens n’hésitent pas à n’y voir, comme pour la lumière, qu’une vibration de ce fluide impondérable que l’on appelle l’éther. Ainsi objectivement la chaleur, comme la lumière, n’est pour nous qu’un mouvement, et elle ne devient chaleur sentie que dans un sujet sentant. La chaleur sentie est