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sage ne puisse se faire qu’en reparcourant toute la série des états antérieurs. Par exemple, un éclair ou un coup de tonnerre produira en moi un ébranlement très-vif qui, je l’accorde, ne cessera pas tout d’un coup, et je puis passer très-rapidement et à mon insu par des alternatives de bruit et de silence, de lumière et de nuit, avant de m’arrêter au silence complet et à la nuit complète ; mais il n’y a rien là qui m’oblige à repasser par une série de phénomènes antérieurs. Il semble même qu’il faut que l’organe soit déjà arrivé à l’état d’équilibre, pour devenir apte à repasser par la série des modifications antérieures. Ce n’est pas au moment même où le cerveau est encore ébranlé par une impression vive, que les souvenirs se déroulent avec précision.

On sait bien que, dans la mémoire ou dans l’habitude si étroitement liées, il y a une liaison d’états tels que, le premier étant donné, les autres suivent automatiquement, ce qui suppose évidemment une tendance à la reproduction des actes. Mais quelle est la cause de ce phénomène que nous ne rencontrons pas dans le monde inorganique[1] ? C’est ce que la physiologie ne peut nous apprendre, au

  1. Voyez sur cette question de l’habitude, si intimement liée à celle de la mémoire, le profond écrit de M. Ravaillon sur l’Habitude. Paris, 1838.