Page:Janet - Le cerveau et la pensee, 1867.djvu/143

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

normal, sans paralysie ; enfin les autres modes d’expression (écriture, geste, dessin) continuent à subsister. C’est ce qu’on appelle aphasie, alalie, aphémie, chaque médecin ayant sa dénomination. L’aphasie proprement dite paraît un cas assez rare, si l’on en juge par les faits exposés à l’Académie de médecine ; car, dans la plupart des cas cités, la perte de la parole est compliquée d’autres désordres plus ou moins importants. L’exemple le plus frappant est celui qu’a cité M. Trousseau.

« Un jour, un monsieur entre dans mon cabinet et me remet un papier ; je lui demande s’il est muet, et, par un geste très-expressif, il me fait savoir que non. Il avait été frappé d’un coup de sang huit jours auparavant ; il avait perdu depuis lors la parole, mais il n’avait perdu que cela. Il écrivait, donnait ses ordres, entretenait une active correspondance comme par le passé ; il n’était donc aphasique que par la parole, mais il ne l’était ni par l’écriture ni par les gestes[1]. »

M. Bouillaud cite également ce fait d’une jeune fille qui, malgré son état d’aphasie, avait conservé toute son intelligence et répondait si bien par oui et non, et par ses gestes, aux questions qu’on lui faisait, qu’un jeune interne, qui avait eu à l’examiner pour un concours et à en faire le sujet de sa leçon, ne

  1. Page 651.