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LE CALVAIRE

Il faut, pour apaiser nos vulgaires ennuis,
La majesté des monts, des forêts ou des grèves.

Les bois enténébrés ont fermé l’horizon ;
Et, dans le soir très lent qui tombe avec mystère,
Je ne distingue plus que la Croix solitaire,
Allongeant son reflet sur les eaux sans frisson.

Je regarde longtemps ce Dieu qu’on abandonne,
Ce Dieu qui reste là cloué sur le granit,
Ce Dieu que l’on torture et pourtant qui bénit,
Ce Dieu que l’on blasphème et pourtant qui pardonne.

Ses deux bras sont ouverts devant l’Humanité ;
Vers la douleur de l’homme il a penché la tête :
Mais jamais à ses pieds un passant ne s’arrête ;
Seul, le bois le contemple et n’est pas attristé.