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DANS LA BRUYÈRE


Oh ! sinistres couchers des froids soleils d’automne !
Une lande toujours, toujours des flots géants,
Et, sépulcre pieux du plus grand des néants,
Cette tour en ruine où dort la Foi bretonne !

Les paysans qui vont par les profonds labours
Ne sont plus revêtus des costumes celtiques ;
On n’entend plus dans l’air les carillons mystiques
Qui, du haut des clochers, s’égrenaient sur les bourgs.

Les poètes, errants dans cette plaine immense
Où les cultes détruits ont laissé leurs sillons,
Pleurent ce monde mort sous les négations
Et doutent tristement du monde qui commence.

L’homme ne connaît plus l’amour du sol natal.
Le vent qui dispersa les dieux et les patries,
Avec les vains espoirs et les feuilles flétries,
Dans l’insondable abîme emporta l’Idéal.