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DANS LA BRUYÈRE


Je ne suis plus l’enfant dont le chant des oiseaux
Consolait aisément la tristesse sans cause,
Et qui, jetant des fleurs au courant des ruisseaux,
Bornait son avenir au destin d’une rose.

Une immense détresse a dévoré mon cœur :
Vous ne chanterez plus qu’au fond de ma mémoire,
Ô radieux refrain de mon passé vainqueur !
Je ne sais plus aimer et j’ai grand’peine à croire.

Ma lèvre a désappris les sourires charmants ;
J’ai vu que l’avenir était plein de mensonges.
Je ne trouverais plus sous les rameaux dormants
La sente où l’on se perd en effeuillant des songes.

Puisque je n’ai pas su cueillir les longs espoirs,
Je cherche, triste et seul, l’oubli d’un monde infâme :
Mais le deuil de mon cœur a rendu les cieux noirs,
Et dans les vagues bruits j’entends pleurer mon âme.