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LA MORT DU TAUREAU


Impassible toujours sous les coups insultants,
Sans se hâter jamais en sa massive allure,
Il secoue un instant sa peau rugueuse et dure,
Comme il faisait, l’été, quand il chassait les taons.

Alors, vers ses flancs roux tournant sa grosse tête
Et fouettant ses jarrets de sa queue au poil ras,
Il s’arrête, stupide, et regarde là-bas,
Prêt à fuir au lointain dans un bruit de tempête.

Hier, il courait ainsi par les prés du vallon.
Fauve, éperdu, farouche, il allait en aveugle ;
Et les pâtres disaient : « Ecoutez-le qui beugle ! »
Et fuyaient en voyant ce vivant tourbillon.

Cependant, par surprise, on lui mit une entrave :
Et les troupeaux du bourg virent passer, honteux,
Ce roi que des bouviers conduisaient devant eux,
De leurs vils aiguillons excitant son pas grave.