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DANS LA BRUYÈRE


Voici l’étroit sentier bordé par des fleurs blanches :
Je marchaïs à pas lents, je murmurais des vers ;
Il fallait me baisser pour passer sous les branches,
Et je voyais l’azur entre les rameaux verts.

L’avenir souriait à mon âme enfantine ;
Il savait revêtir de si riches couleurs,
Quand la brise de mai, secouant l’aubépine,
Baignait mes cheveux noirs d’une neige de fleurs.

Mais, lentement, le ciel triste, les mers sauvages,
Pénétrèrent mon cœur de solennels effrois :
Et ma jeunesse en deuil erra sur les rivages
Où des menhirs païens sont mêlés à des croix.

Nul ne peut échapper à l’attrait du mystère,
Devant les vastes flots et l’infini du soir :
La pensée est plus grave et l’âme plus austère,
Et l’homme est soulevé par un immense espoir.