Page:Jan - Dans la bruyère, 1891.djvu/139

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
131
LA MORT DE PIERROT


Et, sans remercier l’azur, Pierrot s’élance…
Incendiant la neige et les mornes granits,
L’immense poudroiement des soleils infinis
Tombe au gouffre de l’ombre à travers le silence.

Et Pierrot tend les mains à la poussière d’or…
Sur les déserts de glace, au fond de la ravine,
Se disperse toujours la semence divine,
Sans éveiller l’écho de la terre qui dort.

Levant les yeux au ciel et se heurtant aux pierres,
Tel qu’un fantôme blanc sous le neigeux linceul,
Pierrot court ; dans la nuit il passe, blême et seul :
Et les astres de flamme empourprent ses paupières.

Il franchit les torrents, il gravit les sommets…
Allumant dans sa chute un rose crépuscule,
Sous les cieux plus profonds le poudroiement recule,
Chaque astre tombe, luit, et s’éteint à jamais.