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DANS LA BRUYÈRE


Non, Pierrot ne sent pas les morsures glacées
Que l’âpre vent du Nord met à son front blafard :
Il regarde l’étang où dort le nénufar,
Et roule en son cerveau de sinistres pensées.

Puis il régarde encor le vaste écrin des cieux
Où cent mille joyaux font comme une fournaise :
Les yeux écarquillés, il les compte à son aise,
Mais le pauvre Pierrot ne compte que des yeux.

Il chante doucement un air mélancolique,
Hélas ! pour attendrir les astres inhumains :
Nulle obole d’en haut ne tombe dans ses mains ;
L’avare firmament n’entend pas sa supplique.

Pierrot, désespéré par son affreux destin,
Baigne de pleurs amers sa face enfarinée.
Ô miracle ! voilà qu’une longue traînée
D’étoiles d’or s’écroule à l’horizon lointain !