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comme les cloches du troupeau traînassant.
Et la Lucie, joyeuse et roug-issante,
criait : « Martin est là I Ouvrez la grange ! »
L*ombre s’ouvrit. Une à une les bêtes
se pressaient, galopantes, vers les crèches.
Sous leurs cils blancs luisaient leurs yeux dorés.
Et des agneaux nés en route suivaient.
L’un, trop jeune encore pour pouvoir marcher,
comme une loque, au flanc de l’âne, pendait.
Les poules gloussaient, la tête mobile,
ouvrant leurs yeux ronds de côté, craintives.
L’une sur son dos portait un petit.
Et Jean de Noarrieu voyait la Lucie
trembler de joie près du pâtre immobile
qui regardait au loin vers les collines.
Elle haletait un peu, les joues rouges
comme une grenade ou de la farouche,
levant vers lui ses yeux, son nez, sa bouche.
Ses dents riaient, elle frissonnait toute.
Et elle était comme après une course,
quand, le cœur plein d air trop vif, on étouffe.