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trats et des parents. Il serait bon que celle qu’une injuste destinée astreint au célibat ait le droit de le rompre, et de rompre avec tous ceux qui la blâmeraient de cette action, échappant ainsi à leur hypocrite mépris ; et qu’elle pût leur dire, le jour qu’elle se sentirait devenir mère : je m’en vais où bon me semble, puisque vous me refusez une place au chenil.


La voix de M. d’Astin tremble et s’élève. Ainsi au temps de sa jeunesse, devait-il donner à sa parole ce ton d’autorité que savent avoir tous ceux qui commandent à la douleur et aux dangers.

— Ne soyez pas si émue, ma chère enfant, reprend-il. Donnez-moi la main, et ayez confiance.

Et, se retournant vers le portrait de la créole qui décore le fond de la chambre, il l’indique d’un mouvement de tête à Almaïde :

— C’était l’amie d’un ami. Elle est morte victime de la honte que suscitèrent en elle ces hypocrites préjugés. Elle avala du laudanum, et son trépas tragique bouleversa à jamais les idées de celui qui l’aimait. Elle se nommait Laura Lopez.

Puis, désignant le portrait de la Chinoise :

— Elle se nommait Li-Tsée. C’était la fille d’un mandarin. Il s’opposait à son mariage. Elle se donna à moi. Je ne demandais qu’à continuer de