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FEUILLES DANS LE VENT

quels parchemins indéchirables et enluminés la vie des saints ?

Je me suis laissé dire que pendant la lente conception d’un tableau et avant que de le réaliser, les vieux maîtres ne trouvaient jamais assez de soin et d’amour du cœur pour les matières qui devaient concourir à la confection de l’œuvre. Ils s’en allaient dans les forêts surprendre les écureuils dont les poils assouplis devenaient des pinceaux. Et, s’adressant aux plus bruts des minéraux, ils les broyaient avec science sur leurs solides palettes pour les étendre sur un cuivre, un verre, un bois ou une toile précieux. Et quel hommage plus grand eussent-ils décerné au Créateur que de lui rendre la Création dans la mesure la plus large où l’homme ne l’a point contrariée ?

Et l’Église elle-même n’exige-t-elle pas que l’eau, que le pain et le vin, que l’huile et que la cire qui la servent ne soient point adultérés ?

Je méditais sur le choix de la matière au sujet d’une de ces horloges peinturlurées que l’on voit dans nos fermes. Cette horloge était