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RAMEAUX

les berna un instant — et se redira que l’âme des terres et des eaux s’exprime sans creuses paroles. Alors ces lauriers, quelque temps délaissés par eux, ils les retrouveront non pas entre les mains de ces vaniteux « demi-savants » qui, sous prétexte d’instruire le peuple, l’abêtissent, mais entre les mains des fils spirituels de saint Thomas d’Aquin, de Pascal, de Lamartine et de Louis Pasteur.

Ces rameaux, j’ai pu les voir souvent dans les fermes tranquilles, au-dessus de quelque image, mais j’ai surtout médité sur ceux que je voyais fixés parmi les avirons et les bardes ruisselantes, à l’extérieur des taudis des pêcheurs…

J’ai vu ces grandes branches sacrées, l’été, quand Fontarabie danse sous ses colliers de piments rouges et écoute grincer la cigale de la mer ; et je les ai revues, l’hiver, quand les barques secouées par le golfe de Biscaye dressent vers Dieu leurs mâts en croix. C’est vers ces lauriers de la semaine sainte restés au logis que se tendent alors les bras des femmes.