Page:Jammes - Feuilles dans le vent, 1914.djvu/249

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
243
RAMEAUX

rameaux ont de si anciens privilèges qu’au déluge nous trouvons déjà l’un d’eux, il était d’olivier, dans le bec de la colombe de l’Arche.

Dans notre Occident, il n’est encore, en mars, que peu de rameaux. C’est pourquoi chaque paysan soigne un laurier dans son jardin et parfois même un olivier. Ce sont des arbrisseaux au feuillage persistant et ils le font bénir aujourd’hui.

… Que si donc il n’y a pas de bois touffus au dehors, en cette saison, on accomplit néanmoins un miracle : c’est de faire à l’église une belle forêt en l’y apportant branche par branche.

De là ce frémissement de tout mon être lorsque j’entends bruire, à la fin de l’hiver, sous la nef, toute cette sombre verdure agitée par les cœurs tremblants des hommes. Car cette brise intérieure que formèrent en nous les orages de la vie, et qui balance insensiblement nos bras comme l’autan berce les branches, elle souffle ici. Mais avant que de retentir par ces mille rameaux à qui nos mains imposent notre émotion, cette brise a puisé sa douceur en Dieu.