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L’OMBRE DE JEAN DE LA FONTAINE

Chères Ombres fraternelles, tenons-nous coites, selon son désir, afin de le laisser rêver.

Une flûte s’élève comme un jet d’eau
du cœur d’une touffe de lilas. C’est
LE ROSSIGNOL

Cette nuit est comme une île sereine au milieu de l’aimable saison inquiète où l’on s’agace de voir flâner les bourgeons.

Au réveil, on croit qu’il fera beau temps, on l’annonce. Mais la nuée pleure comme une enfant et fait grise mine à travers le balancement du catalpa.

… Ou bien si l’on pense que la journée sera pluvieuse, ce n’est pas vrai.

Mais ce soir la nuit est lente comme une déesse et les Ombres des grands poètes font escale dans la baie de la lune.

… Voici Ésope, et Babrius, et Jean dont la fable est pareille au bruit de la fontaine.

Aubergiste ! Ils t’ont enseigné le cœur et la teinte de la pervenche ? Que je t’apprenne le son de l’Amour qui garde les sources de ma