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FEUILLES DANS LE VENT

va-t-il pas leur apparaître comme à ces anciens justes dont parle l’abbé Pierre Vignot « qui le surprenaient dans le défilé des montagnes » ?

Oh ! il n’y a plus à douter de la gloire de ce monde. L’enfant enlève son chapeau et la brise essuie son front comme dans un poème de Lamartine, et pénètre jusqu’à son cœur ainsi qu’un baiser paternel. Est-ce que le Seigneur viendra se reposer dans la cabane quand la nuit va tomber ? Est-ce qu’il ne se repose pas quand il a créé tant de merveilles ? Et la nourrice dit : On ne voit pas ses mains quand il les promène sur la montagne pour la pétrir, mais peut-être qu’on l’entend respirer. La nourrice n’est-elle pas bien près, en cet instant, de ce passage grandiose : « Alors ils entendirent le bruit de Jéhovah Dieu passant dans le jardin à la brise du jour… »

Et les deux innocents tiennent les yeux sur la vallée qu’ils viennent de découvrir, sur la vallée céleste. Non, non, ils ne sont pas dupes ; leurs regards plongent au delà des énigmes. Ils ont raison, et leur foi l’emporte de mille coudées sur les pauvres critiques des incré-