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Scène Deuxième

Un vieux jardin. Buis. Puits. Ricins. Poiriers. Poules.

Suspendue à un arbre, une cage.

Au fond du jardin une tonnelle très ombreuse, noire et luisante.

Le poète et sa fiancée causent enlacés. Assise à la gauche du poète, blanche et grave, son âme.

Il est trois heures après midi. La canicule flambe.

LE POÈTE

Je t’aime.

LA FIANCÉE, (se désenlaçant.)

Je t’aime.Je t’aime. J’ai les cheveux mal arrangés.
Embrasse-moi sur la bouche… Tu n’es pas gai ?
Pourquoi es-tu triste presque toujours ? Embrasse-moi ?

L’ÂME DU POÈTE

Il n’est pas triste. Il est grave et pareil aux bois.
Il est pareil aux maisons des campagnes douces.
Il est pareil aux tranquilles et douces mousses.
Il est pareil aux fumées calmes des vieux toits.
Il est pareil à la rivière vers le soir.
Il est pareil au calme du vieux foyer noir.