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Le poète médite. Il songe à ces prophètes
qui, comme des goélands, crient dans la tempête.
Et le souffle du Saint-Esprit qui se révèle
pousse au large du Ciel obscur leurs caravelles.

Ils tiennent un journal de bord dont le papier
conserve çà et là, mystérieux herbier,
une feuille de l’Arbre où Dieu sera greffé.
Les océans futurs par eux sont traversés.
Ils ramènent, aux crocs de leurs ancres de rouille
une éponge, une Croix, des deniers, la dépouille
du Crucifié, des dés, une lance, un fouet :
épaves d’un naufrage à venir, dispersées
çà et là comme des étoiles dans l’abîme,
comme les phrases d’un poème où sont des vides,