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Puis, lorsqu’ils ont été amenés à apprécier les avantages de l’agriculture et d’une vie sédentaire, la tente s’est transformée, non point d’abord au point de vue de la forme, mais sous le rapport des matériaux employés à sa confection. La terre battue a rendu les parois de peau moins perméables aux intempéries de l’air. Des pieux solidement fixés en terre lui donnèrent plus de force pour résister aux ouragans, son toit devint aussi plus résistant, tout en perdant sa mobilité. Puis, lorsqu’il s’agit de construire de nouvelles demeures, on supprima les peaux et la charpente légère qui constituaient la tente pour ne conserver que sa forme, et surtout les matériaux qui n’avaient été d’abord que des accessoires.

Les abris où se réfugient les habitants d’un pays sauvage tiennent bien certainement à la configuration géographique de son sol. Dans les bois, la hutte domine ; dans les pays montagneux, les grottes et les anfractuosités des rochers ; sur les immenses steppes de l’Asie centrale, la tente basse et légère. Puis, ces habitations primitives se perfectionnent à l’aide des productions du sol ; ici avec le bois, là avec le fer, dans un autre endroit par l’emploi de la terre cuite.

Voici donc l’architecture qui rentre, elle aussi, dans le cadre des belles conceptions de M. Ludovic Drapeyron, et son histoire ne deviendra vraiment instructive que lorsqu’on l’illustrera, pour ainsi dire, à l’aide de la géographie[1].

Notre retour s’effectue rapidement. Nous sommes pressés de rentrer dans notre maison flottante, pour prendre le repos que nous n’avons pu trouver à Toraï. Les champs sont plus verts que la veille, par suite de la pluie qui a aussi fort rafraîchi l’atmosphère, et une brise de mer gonfle comme des voiles les robes des Coréens que nous rencontrons.

Au niveau de Sorio, nous apercevons sur la route un personnage habillé à l’européenne. Lui aussi nous a vus, et il s’arrête pour nous donner le temps de le joindre. Il parle assez couramment l’anglais, et nous demande poliment de faire route avec lui. C’est un commerçant de la concession japonaise qui revient d’une

  1. Au reste, les applications du savant système du directeur de la Revue de Géographie se sont tellement vulgarisées, dans ces derniers temps, qu’il devient impossible de les énumérer. Hier encore, c’étaient deux naturalistes distingués, MM. Bonvalot et Capus, qui écrivaient une intéressante relation de voyage : De Moscou en Bactriane, Paris, Plon, 1884, dont le seul but est, disent-ils, dans leur préface, « d’expliquer l’histoire par la géographie ».