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New York[1], 14 voix contre[2], et 12 abstentions[3]. Si les neuf membres de la minorité qui votèrent pour New York eussent voté contre, New York n’obtenait que 21 voix contre 23. Tandis que Marx s’applaudissait du succès de sa ruse et de la victoire qu’il venait de remporter sur les blanquistes, la minorité, de son côté, se félicitait de la faute énorme commise par Marx et les siens, et que ceux-ci n’avaient pu perpétrer que grâce à l’appoint malicieusement fourni par neuf voix autonomistes.


Le vendredi soir eut lieu une troisième séance publique. On y discuta une proposition signée d’un certain nombre de membres de la majorité, et qui consistait à introduire dans les Statuts généraux la résolution IX de la Conférence de Londres, avec une rédaction nouvelle ainsi conçue :


Dans sa lutte contre le pouvoir collectif des classes possédantes, le prolétariat ne peut agir comme classe qu’en se constituant lui-même en parti politique distinct, opposé à tous les anciens partis formés par les classes possédantes.

Cette constitution du prolétariat en parti politique est indispensable pour assurer le triomphe de la révolution sociale et de son but suprême, l’abolition des classes.

La coalition des forces ouvrières, déjà obtenue par les luttes économiques, doit aussi servir de levier aux mains de cette classe dans la lutte contre le pouvoir politique de ses exploiteurs.

Les seigneurs de la terre et du capital se servant toujours de leurs privilèges politiques pour défendre et perpétuer leurs monopoles économiques et asservir le travail, la conquête du pouvoir politique devient donc le grand devoir du prolétariat[4].


Les blanquistes avaient déposé une proposition signée par Arnaud, Cournet, Ranvier, Vaillant et Dereure, contenant une déclaration de principes qui se résumait dans cette formule : « Si la grève est un moyen d’action révolutionnaire, la barricade en est un autre et le plus puissant de tous », et qui demandait au Congrès de déclarer que « l’organisation militante des forces révolutionnaires du prolétariat et de sa lutte était mise à l’ordre du jour du prochain Congrès ».

J’emprunte de nouveau au Bulletin le compte-rendu de la discussion :


Le débat n’eut pas un caractère sérieux. Les deux orateurs qui soutinrent la proposition du Conseil général, Vaillant et Hepner, n’apportèrent pas le moindre argument.

Vaillant se borna à faire l’éloge de la force et de la dictature, en déclarant que ceux qui ne pensaient comme lui étaient des bourgeois

  1. Les trente délégués qui votèrent pour New York sont : J.-Ph. Becker, Reinhard Becker, Cuno, Dumont [Faillet], Dupont, Engels, Farkas, Friedländer, Kugelmann, Lafargue, Lessner, Le Moussu, Longuet, Lucain (pseudonyme), Mac Donnell, Marx, Pihl, Serraillier, Swarm [d’Entraygues], Vichard, Wroblewski, de la majorité ; Brismée, Coenen, Dave, Fluse, Herman, Hoach, Sexton, Splingard, Van den Abeele, de la minorité.
  2. Les quatorze délégués qui votèrent contre New York (les cinq blanquistes et neuf autres, tous de la majorité) sont : Arnaud, Cournet, Dereure, Duval, Fränkel, Heim, Hepner, Ludwig, Milke, Ranvier, Schumacher, Vaillant, Wilmot (pseudonyme), Walter[Van Heddeghem].
  3. Les douze abstenants sont Alerini, Cyrille, Eberhardt, Farga-Pellicer, Gerhard, Guillaume, Marselau, Morago, Schwitzguébel, Van der Hout, de la minorité ; Johannard et Sorge, de la majorité.
  4. Cet alinéa est emprunté à l’Adresse inaugurale rédigée par Marx en 1864, qui n’avait jamais été considérée comme constituant un programme officiel et obligatoire. La Conférence de Londres avait rappelé ce texte dans les considérants de sa résolution IX ; le Congrès de la Haye va le transformer en une disposition statutaire.