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février, la détresse redouble ; il faut faire une lettre de change de 300 fr. à la propriétaire, payable à la fin du mois : c’est alors que Mme  Bakounine écrit à Ogaref (9 et 18 février 1872) deux lettres éplorées et inutiles (imprimées dans la Correspondance) ; Ross, à ce moment, malade à Montpellier, envoie 100 fr. (11 février), et une traite que consent à négocier un certain Simon procure 200 francs. En mars arrivent de Gambuzzi 200 fr., et de Russie viennent 50 roubles (165 fr.). Enfin la situation s’améliore au printemps ; de nouveaux amis russes, à Zürich, mettent à la disposition de Bakounine un peu d’argent.


Le Congrès de la Fédération belge devait avoir lieu, selon l’habitude des années précédentes, à l’époque de Noël. Il se réunit à Bruxelles les 24 et 25 décembre. Un débat eut lieu sur la question qui agitait l’Internationale ; lecture fut donnée de la circulaire de Sonvillier. Après une mûre délibération, le Congrès vota la résolution suivante, qu’il est nécessaire de reproduire in-extenso :


La Fédération belge, réunie en Congrès les 24 et 25 décembre 1871,

Vu les calomnies absurdes répandues tous les jours par la presse réactionnaire, qui veut faire de l’Internationale une Société despotique soumise à une discipline et à un mot d’ordre partant de haut et arrivant à tous les membres par voie hiérarchique ;

Considérant qu’au contraire l’Internationale, voulant réagir contre le despotisme et la centralisation, a toujours cru devoir conformer son organisation à ses principes ;

Déclare, une fois pour toutes, que l’Internationale n’est et n’a jamais été qu’un groupement de fédérations complètement autonomes ;

Que le Conseil général n’est et n’a jamais été qu’un centre de correspondance et de renseignements ;

La Fédération belge engage toutes les Fédérations régionales à faire la même déclaration, pour confondre tous ceux qui nous représentent comme des instruments dociles entre les mains de quelques hommes ;

Considérant, d’un autre côté, que les statuts de l’Internationale, faits à la naissance de l’Association, et complétés un peu au hasard à chaque Congrès, ne délimitent pas bien les droits des fédérations et ne correspondent pas à la pratique existante,

Déclare qu’il y a lieu d’entreprendre une revision sérieuse des statuts ;

En conséquence, la Fédération belge charge le Conseil belge de faire un projet de nouveaux statuts et de le publier pour qu’il soit discuté dans les Sections et ensuite au prochain Congrès belge ; le projet sera soumis au prochain Congrès international.

La Fédération belge engage les autres Fédérations régionales à faire de même, afin que le prochain Congrès international puisse conclure le pacte définitif de la fédération.


Cette résolution affirmait nettement les principes d’autonomie et de décentralisation, et montrait que les Belges pensaient sur ce point tout à fait comme les Jurassiens. Mais elle ne disait pas expressément que ces principes avaient été violés par le Conseil géneral et par la Conférence ; et si, d’une part, on pouvait tirer des considérants belges cette conclusion sous-entendue, que ceux qui, dans l’Internationale, voudraient se faire les partisans de l’autorité et de la centralisation se mettraient en contradiction avec l’esprit même qui avait présidé à la création de l’Association, d’autres eussent pu, avec tout autant de vraisemblance, prétendre — et