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naissance, je crois, en ayant le regret de devoir rompre avec vous, vous devoir cette déclaration : Je suis convaincu que, cédant à des haines personnelles, vous avez porté ou appuyé des accusations injustes contre des membres de l'Internationale, objets de ces haines, ou dont le crime était de ne pas les partager. Je vous salue.

P. Robin.


Quand on s'occupa de moi après plusieurs semaines, ce fut pour me déclarer démissionnaire. J'en fus informé par un ami qui l’apprit indirectement. Le mardi suivant, j'allai au Conseil. Le président Engels m’annonça la décision prise à mon égard. Je répondis qu'il était faux que j'eusse donné ma démission, et que je ne me retirerais pas. Alors on discuta une heure et demie pour arriver à décider que l'on ne recommencerait pas à discuter la question de ma démission. Ce fut l'occasion de nombreux bredouillements de M. Engels, et d'aboiements du Serraillier. Ce monsieur eut l'aplomb de menacer l'assemblée de sa démission, si elle revenait sur son vote. Ces pauvres gens déclarèrent donc que leur vote aurait force de loi. À quoi je répondis que la démission était un acte volontaire, et que je ne me retirerais que chassé : il faut que le Conseil ait le courage de ses actes. Nouveaux discours de la part de gens qui ont déjà clos deux fois la discussion. Engels explique ma pensée et propose de mettre aux voix mon expulsion. L'aimable Longuet est peiné du manque d'égards que je sollicite. Mon ami intime et commensal Fränkel[1], que mon expression de « courage » a excité, veut que le Conseil se montre et me chasse. Jung, d'une voix de clergyman, dit que, n'ayant pas parlé jusque-là, il croit devoir faire observer que le Conseil n'a pas à discuter cette question, mais simplement à exécuter le vote de la Conférence. Le jésuite en impose : revoir en effet la lettre claire, quoique en français assez barbare, des sieurs Serraillier et Rochat. Serraillier annonce qu'il ne dira plus rien, parce que, s'il parlait, il aurait à dire des choses qui — des choses que... !

Les deux lettres suivantes (traductions littérales), qui n'ont pas besoin de commentaires, terminent l'histoire de mon expulsion du Conseil général :


Au secrétaire général du Conseil général de l'A. I. des T.

C'est une coutume qui me paraît fort sage que tout tribunal envoie à ceux qu'il juge un extrait détaillé de leur jugement. Je suis étonné de n'avoir reçu aucune notification officielle de mon expulsion du Conseil général de l'A. I. des T., mais je pense que ce n'est qu'un oubli que vous serez assez bon pour réparer sans délai.

24 octobre 1871.

Votre serviteur, P. Robin.

International Working Men's Association.

26 octobre 1871.

Cher Monsieur, Comme ce n'est pas une coutume anglaise que d'envoyer des transcriptions des procès-verbaux comme vous désiriez que je le fisse, j'ai consulté le Conseil sur ce sujet, et il a été décidé que je ne devais pas satisfaire à votre requête. Je regrette donc de n'avoir pas d'autre alternative que de refuser votre requête. Je suis, Monsieur, votre obéissant serviteur.

John Hales.


Il a été parlé plus haut du délégué espagnol, Anselmo Lorenzo. Il est utile de faire connaître dans quelles conditions ce délégué, « le seul qui eût un mandat impératif », avait été envoyé à la Conférence de Londres.

  1. Robin avait connu Fränkel à Paris, et l'avait ensuite accueilli fraternellement lorsque celui-ci, dans l'été de 1871, quitta Genève, où il s'était réfugié d'abord, pour Londres. Mais l'influence de Marx eut bien vite brouillé Fränkel avec son ancien ami.