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de la Chaux-de-Fonds, du Locle et du Val de Saint-Imier, fit faire un pas à la crise. Le meeting reconnut les principes du Congrès de Bruxelles, et répudia la Montagne.

Enfin le Congrès de Bâle, qui confirma les résolutions de Bruxelles, posa la question d'une manière décisive. Le programme de l'Internationale l'ut nettement fixé, et il ne fut plus possible à personne de se réfugier dans l'équivoque ; il fallut, ou bien se l'allier au programme, ou bien, en se déclarant contre le programme, se placer soi-même dans les rangs des adversaires de la révolution.

Une fois la situation ainsi éclairée, les affaires à la Chaux-de-Fonds prirent une tournure nouvelle. La Montagne et ses hommes furent complètement délaissés, et les véritables socialistes purent, sur les bases indiquées à Bâle, travailler à l'organisation d'une fédération ouvrière locale. Cette œuvre a réussi, et, lors même que toutes les sociétés qui font partie de cette fédération ne sont pas entrées dans l'Internationale, nous n'en voyons pas moins dans ce résultat un triomphe de nos idées : car le fait même d'avoir compris la nécessité d'une fédération constitue une adhésion à notre principe.

Il nous reste à dire un mot des trois questions principales que le Congrès aura à traiter.

Sur la première, l'organisation des caisses de résistance, tout le monde est d'accord ; c'est-à-dire que tout le monde reconnaît que la caisse de résistance doit devenir, dans chaque corps de métier, le noyau autour duquel se forme la Section ; partout où il se crée une caisse de résistance, il se crée du même coup — que ce soit ou non l'intention des fondateurs — une Section de l'Internationale. Tout le monde reconnaît aussi que les caisses de résistance, pour acquérir une puissance capable de lutter contre l'action du capital, doivent être fédérées entre elles ; et dans un article publié dans notre numéro du 8 janvier dernier[1], un de nos collaborateurs a très bien indiqué, à notre avis, la manière dont cette fédération doit être réalisée. Mais nous croyons qu'il est assez indifférent, en ce moment, que le Congrès se décide pour tel ou tel système de fédération ; en effet, nous manquons des expériences nécessaires pour prononcer sur ce point-là d'une manière scientifique ; lorsque le Congrès aura adopté un système, ce ne sera que pour en faire l'essai ; s'il fonctionne bien, c'est que nous serons, par bonne chance, tombés juste du premier coup ; s'il fonctionne mal, un nouveau Congrès le modifiera et le perfectionnera au moyen des lumières acquises.

Sur la seconde question, la coopération, nous ne pouvons mieux faire que de nous en référer aux réflexions du Conseil général belge à ce sujet — on les trouvera dans ce numéro — et au remarquable rapport présenté par De Paepe au Congrès de Lausanne en 1867. Il va sans dire que la coopération, en soi, ne peut pas être condamnée, puisqu'elle est la forme du travail dans l'avenir ; ce qu'il faut condamner, croyons-nous, c'est la tendance de ceux qui proposent la

  1. L'article de Robin intitulé : La liberté et la solidarité.