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comme branche de l'Internationale ; 2° tous les articles du règlement de l'Alliance statuant sur ses relations avec l'Internationale sont déclarés nuls et de nul effet. Les considérants démontraient de manière claire et frappante que l'Alliance n'était rien qu'une machine destinée à désorganiser l'Internationale.

Ce coup était inattendu. Bakounine avait déjà transformé l’Égalité, l'organe central des membres de langue française de l'Internationale en Suisse, en son organe personnel[1], et il avait fondé en outre au Locle un petit moniteur privé, le Progrès[2]. Le Progrès continue encore à jouer ce rôle sous la rédaction d'un partisan fanatique de Bakounine, un certain Guillaume.

Après plusieurs semaines de réflexion, le Comité central de l'Alliance envoya enfin une réponse au Conseil général, sous la signature de Perron, un Genevois. L'Alliance, dans son zèle pour la bonne cause, était prête à sacrifier son organisation particulière, mais à la condition toutefois que le Conseil général déclarât reconnaître ses principes « radicaux ». Le Conseil général répondit qu'il était en dehors de ses fonctions de prononcer comme juge sur les programmes théoriques des différentes Sections : qu'il avait seulement à veiller à ce qu'ils ne continssent rien de directement contraire aux statuts et à leur esprit ; qu'il devait en conséquence insister pour que la phrase ridicule du programme de l'Alliance sur l’égalité des classes[3] fût éliminée et remplacée par l’abolition des classes[4] (ce qui fut fait) ; qu'enfin l'Alliance serait admise après la dissolution de son organisation internationale particulière, et après qu'elle aurait communiqué au Conseil général (ce qui ne fut jamais fait) une liste de toutes ses branches[5].

L'incident se trouva ainsi vidé. L'Alliance prononça sa dissolution nominale, mais elle continua d'exister en fait sous la direction de Bakounine, qui gouvernait en même temps le Comité fédéral romand[6]. Aux organes dont elle disposait vient s'ajouter la Confederacion[7] à Barcelone, et, après le Congrès de Bâle, l’Equalità[8], à Naples.

Bakounine chercha à atteindre son but — transformer l'Internationale en son instrument personnel — d'une autre façon. Il fit proposer au Conseil général, par notre Comité romand de Genève, de placer la question de l'héritage dans le programme du Congrès de Bâle. Le Conseil général y consentit, afin de pouvoir assommer Bakounine d'un coup décisif[9]. Le plan de Bakounine était celui ci : Le Congrès de Bâle ayant adopté les principes (!)[10] proclamés par

  1. Pendant les six premiers mois d'existence de l’Égalité, Bakounine y écrivit deux ou trois fois à peine.
  2. Les fondateurs du Progrès ne connaissaient pas encore Bakounine.
  3. En français dans le texte. Lire : « l'égalisation des classes ».
  4. En français dans le texte.
  5. En anglais dans le texte.
  6. Comment se fait-il que ce Comité, gouverné par Bakounine, ait refusé d'admettre la Section de l'Alliance dans la Fédération romande ?
  7. Lire: « la Federacion ».
  8. Lire : «l’Eguaglianza ».
  9. On comprend pourquoi l'échec de la résolution présentée à Bâle au nom du Conseil général fut si nuisible à son auteur, pourquoi Eccarius ne put retenir cette exclamation : Marx wird sehr unzufrieden sein !
  10. Le point d'exclamation est dans le texte.