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VII


Le n° 7 du Progrès (3 avril), devenu « organe socialiste » et paraissant tous les quinze jours. L’Égalité : à la demande de Bakounine, j'écris un article sur le droit d'héritage (Égalité du 1er mai). Agitation en France et en Belgique. N° 8 du Progrès (17 avril). Netchaïef. N° 9 du Progrès (1er  mai).


Le n° 7 du Progrès est daté du samedi 3 avril. Il portait en sous-titre les mots : « Organe socialiste, paraissant au Locle tous les quinze jours. Prix d'abonnement : pour un an, 4 francs », et il débutait par l'avis suivant :


À nos lecteurs. — Le bon accueil fait à notre journal par nos amis nous engage à en rendre la publication régulière. Le Progrès paraîtra donc à l'avenir tous les quinze jours. Il continuera de discuter, en dehors de toute préoccupation politique et de toute haine personnelle, les intérêts du travail, et d'exposer les solutions données par la science aux questions sociales.


Voici l'article de tête de ce numéro, qui était une sorte de profession de foi :


Guerre aux choses, paix aux hommes !

Quand on étudie l'histoire du genre humain à la lumière des sciences naturelles, qu'on analyse avec une critique sérieuse les phénomènes complexes qui s'appellent révolutions, et qu'on cherche à se rendre un compte exact des causes et des effets, on s'aperçoit que la volonté individuelle joue un très petit rôle dans les grandes secousses qui changent le sort des peuples, et on apprend à discerner les véritables causes, c'est-à-dire l'influence des milieux.

Pour l'homme qui se place à ce point de vue, la haine des individus cesse d'exister. Lequel de nous rendra responsable de son avilissement un malheureux vagabond qui, traité dès sa naissance comme un paria par la société, a été poussé à la paresse et au vice par l'inhumanité de ses frères ; ou une misérable femme qui s'est vendue, parce que son travail ne pouvait pas lui donner du pain ? Le sentiment que produit en nous la dégradation de ces infortunés, ce n'est pas l'indignation contre leur personne, c'est l'indignation contre un ordre de choses qui produit de pareils résultats. Il en est de même, d'une manière plus générale, des individus et des classes dont nous étudions les actes dans l'histoire. Nous les voyons se produire et se développer, d'après des circonstances données : nous jugeons, et lorsqu'il le faut, nous condamnons, mais nous ne haïssons pas.

Tels sont les sentiments qui nous animent dans notre critique de la bourgeoisie et des institutions bourgeoises. Nous pensons que la bourgeoisie exerce une domination oppressive, qu'elle exploite le travail, qu'elle est un obstacle au progrès de l'humanité. Nous disons cela avec calme parce que c'est une vérité scientifique, et non pas le cri aveugle de la passion ; et nous concluons qu'il faut combattre les institutions bourgeoises, et ne point haïr les bourgeois.

Qu'on y réfléchisse, et l'on verra que nos adversaires font tout le contraire.

Les partis politiques ne cherchent pas la justice, ils se disputent