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sée à Van Heddeghem, a été lue à l’audience, de même que le texte du mandat délivré au proconsul parisien. La lettre de Sorge dit entre autres : « Des mandataires ont été nommés pour Toulouse et Bordeaux ; Auguste Serraillier, de Londres, a été nommé représentant du Conseil général pour la France, sous date du 22 décembre 1872, chargé et autorisé d’agir au nom du Conseil général ».

Donc, au-dessus des proconsuls locaux de Paris, Toulouse et Bordeaux, il existe un proconsul général pour la France, et c’est le sieur Serraillier, résidant à Londres, qui remplit cette haute fonction. Nous savions déjà par le Volksstaat que Marx avait reçu des fonctions analogues pour l’Allemagne. Ce qui veut dire bien clairement que Sorge et ses acolytes de New York ne sont que les hommes de paille de la coterie de Londres, et que le pouvoir réel est resté entre les mêmes mains qu’avant le Congrès de la Haye.

Voici quelques extraits du mandat de Van Heddeghem, que nous ne pouvons donner en entier, vu sa longueur :

« Le compagnon L. Heddeghem est nommé provisoirement mandataire du Conseil général pour le district de Paris, où il devra agir d’après les instructions suivantes :

« 1° Il organisera l’Internationale dans le district mentionné conformément aux statuts et règlements généraux et aux résolutions du Congrès...;

« 5° Il enverra au mandataire du Conseil général, résidant à Londres, une copie exacte de toutes les communications adressées au Conseil général ;

« 6° Il aura droit de suspendre une organisation ou un membre quelconque de son district, jusqu’à l’arrivée de la décision du Conseil général, auquel il donnera avis immédiatement de chaque suspension prononcée, en y joignant les pièces justificatives et la supplique (sic) des partis accusés. »

Ce mandat est signé Sorge et daté du 30 décembre 1872.

Voilà un échantillon de la splendide organisation que la majorité du Congrès de la Haye a rêvé de donner à l’Internationale. Est-ce que devant de semblables aberrations et les beaux résultats qu’elles ont produits, ceux qui sont encore aveuglés n’ouvriront pas les yeux ?

Marx avait trois mandataires en France : l’un, Swarm [Dentraygues], s’est trouvé un mouchard ; le second, Van Heddeghem, a renié l’Internationale ; du troisième, celui de Bordeaux, nous ne pouvons rien dire, ne le connaissant pas[1]. Mais à eux trois, à quoi ont-ils abouti ? à faire arrêter de malheureux ouvriers, sans constituer la moindre organisation sérieuse.

Et c’est à cette occasion qu’un des gendres de Marx, M. Longuet, a l’effronterie ou la naïveté de s’écrier, dans une lettre publiée par la Liberté de Bruxelles du 6 avril 1873, que les adversaires du Congrès de la Haye sont de mauvaise foi, parce que « ils ont attaqué les mandats français, dont les tribunaux se chargent aujourd’hui de démontrer l’authenticité[2] ».

  1. Il s’appelait Larroque, nous l’avons vu plus haut (p. 38). À la nouvelle des arrestations, il avait quitté la France ; Engels écrit à Sorge, le 20 mars : « Lar-roque a réussi à s’échapper, et est arrivé, via Londres, à Saint-Sébastien, d’où il cherche à renouer des relations avec Bordeaux ».
  2. Engels avait annoncé à Sorge, le 20 mars, cette lettre de Longuet à la Liberté, en ces termes : « Les injures de Jung et de Hales font le tour de la presse secessionniste, jurassienne, belge, etc. ; Longuet veut y répondre dans la Liberté ; mais le fera-t-il ? étant donne sa paresse, j’en doute un peu ».