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l’a écrite connaissent certainement le français, et peuvent recourir à la belle traduction de J. Roy, entièrement revue par l’auteur... C’est pour une tout autre sorte de gens que je dois travailler... mon travail doit donc être un abrégé facile et court du livre de Marx... Restreinte et modeste est ma tâche. Je dois seulement guider une troupe d’ardents adeptes (volenterosi seguaci), par le chemin le plus facile et le plus court, au temple du Capital ; et là démolir ce dieu, pour que tous puissent voir de leurs yeux et toucher de leurs mains les éléments dont il se compose ; et arracher les vêtements de ses prêtres, afin que tous puissent voir les taches de sang humain qui les souillent et les armes cruelles avec lesquelles ils immolent chaque jour un nombre sans cesse croissant de victimes. »

À la fin de l’Abrégé (chapitre X, p. 121 ), parlant en son nom propre, Cafiero cite cette phrase de Marx, à propos des atrocités commises en Angleterre et partout par les capitalistes : «Si, comme le dit Marie Angier (1842), c’est avec des taches naturelles de sang sur une de ses faces que l’argent est venu au monde, le capital, lui, y est venu suant le sang et la boue par tous les pores », — et il ajoute :

« Et c’est là tout simplement de l’histoire, ô bourgeois, une triste histoire de sang bien digne d’être lue et méditée par vous qui savez, dans votre vertu, exprimer une sainte horreur pour la soif de sang[1] des révolutionnaires modernes ; par vous, qui déclarez ne pouvoir permettre aux travailleurs que le seul usage des moyens moraux[2]. »

Enfin, dans les pages intitulées Conclusion, Cafiero écrit :

« Le mal est radical. Il y a déjà longtemps que le savent les travailleurs du monde civilisé, — pas tous, certainement, mais un grand nombre ; et ceux-ci préparent déjà les moyens propres à le détruire.

« Ils ont considéré : 1° que la source première de toute oppression et de toute exploitation humaine est la propriété individuelle ; 2° que l’émancipation des travailleurs (l’émancipation humaine) ne peut être fondée sur une nouvelle domination de classe, mais sur la fin de tous les privilèges et monopoles de classe et sur l’égalité des droits et des devoirs ; 3° que la cause du travail, la cause de l’humanité, n’a pas de frontières ; 4° que l’émancipation des travailleurs doit être l’œuvre des travailleurs eux-mêmes. Et alors une voix puissante a crié : Travailleurs du monde entier, unissons-nous ! Plus de droits sans devoirs plus de devoirs sans droits ! Révolution !

«... Le mot Révolution pris dans son sens le plus large, dans son sens véritable, signifie retour au point de départ, transformation, changement. En ce sens, la révolution est l’âme de toute la matière infinie. En fait, tout, dans la nature, accomplit un cycle éternel, tout se transforme, mais rien ne se crée et rien ne se détruit. La matière, demeurant toujours la même en quantité, peut changer de forme en des modes infinis... La matière, donc, passant d’un mode de vie à un autre mode, vit en changeant sans cesse, en se transformant, en se révolutionnant.

« Or, si la révolution est la loi de la nature, qui est le tout, elle doit être aussi nécessairement la loi de l’humanité, qui est la partie... Mais les bourgeois, après être arrivés, par le massacre, l’incendie et la rapine, à conquérir le poste de dominateurs et d’exploiteurs du genre humain, croient pouvoir arrêter le cours de la révolution. Ils se trompent... Une fois abattus les obstacles matériels qu’on lui oppose, et laissée libre dans son cours, la révolution saura réaliser, parmi les hommes, l’équilibre, l’ordre, la paix et le bonheur...

« Mais comment feront les travailleurs pour rétablir le cours de la Révolution ? Ce n’est pas ici le lieu de développer un programme révolutionnaire... : nous nous bornerons, pour conclure, à répondre par ces paroles, recueil-

  1. « La libidine di sangue ». Acte d’accusation contre les internationalistes de la bande insurrectionnelle de San Lupo, Letino et Gallo, en avril 1877. (Note de Cafiero.)
  2. Aménité dite par un magistrat au cours du procès sus-mentionné. (Note de Cafiero.)