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La Fédération jurassienne, après le procès de Berne, s’était accrue de deux nouvelles sections : une section qui se reconstitua à Bienne ; et une section italienne qui fut formée parmi les ouvriers de langue italienne travaillant à Saint-Imier, et qui adhéra à la fédération ouvrière du district de Courtelary. Le nombre des sections de la Fédération jurassienne se trouva ainsi porté à trente et une.

Le Congrès de Saint-Imier avait décidé qu’en ce qui concernait la délégation aux Congrès de Verviers et de Gand, il serait laissé aux sections le soin de s’entendre entre elles pour le choix d’un ou de plusieurs délégués. La Section de la Chaux-de-Fonds me désigna pour son délégué, et, par une circulaire du 20 août, proposa aux autres sections de s’associer à elle pour l’envoi du même délégué. Le délai pour la réponse était court, et vingt et une sections seulement eurent le temps de se réunir et d’écrire. Toutes celles qui écrivirent répondirent affirmativement. Je reçus donc le mandat de représenter, aux Congrès de Verviers et de Gand, vingt-deux sections de la Fédération jurassienne, savoir : Fédération du district de Courtelary, six sections ; Berne, cinq sections ; Genève, deux sections ; Lausanne, Vevey, Porrentruy, Fribourg, Boncourt, Fleurier-Sainte-Croix, Neuchâtel, Chaux-de-Fonds, Zürich (langue française)[1]. Les sections qui ne figurent pas dans cette liste, soit parce qu’elles n’eurent pas le temps de répondre à la circulaire de la Chaux-de-Fonds, soit (pour deux ou trois d’entre elles) parce qu’elles donnèrent des mandats à Rinke ou à Werner, sont : Genève (typographes), Genève (langue italienne), Lausanne (langue allemande), Bienne, Moutier, Bâle (langue française), Bâle (langue italienne), Mulhouse, Zürich (langue allemande).


Pendant que la Fédération jurassienne, plus prospère et plus vivante que jamais, s’apprêtait ainsi à faire représenter ses idées au Congrès général et au Congrès de Gand, le Bulletin (2 septembre) publiait une lettre de Genève où il était parlé en ces termes de l’ancien secrétaire perpétuel de ce qui fut la Fédération romande, le triste sire Henri Perret :


Ils vont bien, les meneurs de l’ancienne coterie marxiste à Genève !

Encore un de ses membres les plus en vue qui vient, sans doute pour être utile au peuple, de faire un plongeon dans la police. Le personnage en question, qui n’est autre que M. Henri Perret, ex-secrétaire de la Fédération romande, a été nommé secrétaire de commissaire de police avec 2400 fr. d’appointements.

Ah, nous comprenons maintenant pourquoi ces Messieurs combattaient l’abstention politique et tenaient à glisser au pouvoir leurs amis ! Grâce à cette tactique, tous les chefs de file sont convenablement assis : députés, commissaires cantonaux, agents des mœurs, agents de la sûreté. Espérons qu’ils vont faire notre bonheur, et, en attendant, signalons à leur bienveillante sollicitude tous ceux qui souffrent.


La rédaction du Bulletin ajouta à cette lettre la note suivante :


M. Grosselin, ancien orateur des meetings de l’Internationale, est député au Grand-Conseil avec jetons de présence, commissaire cantonal à la gare, et maire appointé de Carouge[2] ; M. Josseron, qui fut délégué au

  1. Une somme de 250 fr. fut versée par ces vingt-deux sections pour les frais de voyage de leur délégué à Verviers et à Gand. Le détail des versements a été imprimé au Bulletin du 30 septembre.
  2. Le Bulletin publia, six mois plus tard (23 février 1878), une scandaleuse histoire dans laquelle la probité de M. Grosselin était mise en cause : tout le conseil municipal de Garouge avait donné sa démission en masse, ne voulant pas continuer à siéger avec son maire, qu’on accusait de tripotages financiers à propos d’une fourniture de bancs d’école dont il avait frauduleusement fait majorer le prix.