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James Guillaume. Comment Lengacher peut-il affirmer qu’il est sûr que le coup de stylet a été donné soit par Rinke, soit par Eherhardt ? Voilà une étrange sorte de certitude. Ou bien il a vu celui qui tenait le stylet, et dans ce cas il doit préciser ; ou bien il n’a rien vu, et alors il ne doit pas chercher à diriger le soupçon sur tel ou tel prévenu.

Lengacher. Je n’ai pas vu moi-même, mais il viendra après moi des témoins qui expliqueront ça.


Le second passage contient les dépositions caractéristiques de trois membres de la Fédération jurassienne, Schwitzguébel, Spichiger, et Capt :


Adhémar Schwitzguébel comparaît ensuite. C’est lui qui portait l’un des drapeaux rouges au cortège. Il déclare être très étonné d’avoir été appelé comme témoin, lui qui s’attendait à figurer au banc des prévenus ; car il a, lui aussi, fait résistance à la police en refusant de livrer son drapeau. Ce drapeau lui a été arraché de force, par derrière et par surprise, tandis qu’il discutait avec le préfet ; en se retournant, il a vu trois gendarmes qui tenaient le drapeau, et quelques-uns de ses camarades qui essayaient de le leur reprendre ; aussitôt les gendarmes ont tiré le sabre.

Le président. Avez-vous frappé vous- même ?

Schwitzguébel. Non, je n’ai pas pu : j’ai été bousculé et séparé de mes compagnons.

Le président. C’est pour cela que vous n’avez pas été rangé au nombre des prévenus. Est-il à votre connaissance que les membres de l’Internationale avaient reçu l’ordre de venir à Berne avec des armes ?

Schwitzguébel. Rien de semblable n’a été dit. Si nous avions convenu de nous armer, j’aurais eu moi-même une arme, mais je n’en avais point.

Auguste Spichiger, membre de l’Internationale, déclare comme Schwitzguébel qu’il ne comprend pas pourquoi on l’a appelé comme témoin, tandis qu’il devrait être au banc des prévenus. Lorsque les gendarmes ont saisi les drapeaux, il a fait ses efforts pour leur en arracher un, sans y réussir.

Le président. Avez-vous frappé ?

Spichiger. Non, je n’avais pas de canne ; mais j’ai essayé de reprendre un des drapeaux.

Le président. Puisque vous n’avez pas été cité devant le tribunal à titre de prévenu, mais seulement à titre de témoin, je ne puis pas changer votre position. Y a-t-il eu entre les socialistes entente préalable pour prendre des armes ?

Spichiger. Non.

Le témoin est congédié.

Ch. Capt, membre de l’Internationale, ouvrier à l’usine à gaz, à Bienne. J’étais au cortège, j’ai vu les gendarmes attaquer les drapeaux, je les ai défendus, je me suis ensuite déclaré solidaire de mes camarades : je m’étonne de n’être ici que comme témoin.

Le président. Avez-vous pris une part active à la lutte ?

Capt. Sans doute ; j’ai frappé, et j’ai été frappé aussi.

Le président. Qui a commencé les voies de fait ?

Capt. La police ; avant qu’aucun de nos camarades eût bougé, j’ai vu des sabres en l’air.