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jamais pu obtenir qu’on les lui communiquât ; tout cela met en lumière avec plus d’évidence que jamais une chose dont vous vous êtes aperçus comme nous, et dont, pour notre part, nous avions les preuves en mains depuis longtemps : l’existence d’un vaste système d’intrigues secrètes au sein de l’Internationale, dans le but d’assurer la domination de M. Marx sur notre Association. Et l’acharnement de ces intrigants à dénoncer l’existence d’une soi-disant Alliance secrète n’est, comme vous nous le dites en d’autres termes, que la répétition de la manœuvre bien connue du filou qui crie Au voleur ! pour détourner l’attention.

Nous vous remercions de l’envoi de votre journal, the International Herald, et nous avons été heureux d’y lire les progrès que l’Internationale fait en Angleterre. Nous espérons que vous nous tiendrez au courant de tout ce qui se passera dans notre pays intéressant la cause ouvrière, et dans ce but nous vous soumettrons une idée : Chaque Conseil fédéral ne pourrait-il pas, une fois par mois, rédiger une circulaire rendant compte de la situation de sa région, et adresser un exemplaire de cette circulaire aux autres Conseils fédéraux ? Nous pourrions de cette manière, sans avoir besoin de centraliser les renseignements au moyen d’un Conseil général, nous tenir mutuellement au courant de tout ce qui se passe, et la vie créée de cette façon amènerait une union et une solidarité toujours plus grandes entre les Fédérations des divers pays.

Nous vous prions de mettre cette idée à l’étude, et, en attendant votre réponse, nous vous présentons notre salut fraternel.

Au nom et par ordre du Comité fédéral jurassien,

Le secrétaire correspondant :

Adhémar Schwitzguébel.


Cependant Marx préparait contre le Conseil fédéral anglais un coup d’État semblable à celui qui avait été exécuté, l’hiver précédent, à New York, contre le Conseil fédéral américain[1]. Il réussit à faire entrer dans le Conseil anglais quelques hommes à lui, Dupont, Murray, Milner, etc., et à gagner à sa cause le propriétaire de l’International Herald, le publiciste Riley. À la suite de l’insertion, dans l’International Herald du 23 novembre, d’un article mensonger sur une conférence faite à Nottingham par un agent de Marx, De Morgan, ce journal cessa, à partir de son numéro du 30 novembre, d’être l’organe du Conseil fédéral[2]. Le Conseil alors, quittant « l’attitude expectante », décida de convoquer pour le 5 janvier 1873 un Congrès de la Fédération anglaise, auquel serait soumise la question de l’adoption ou du rejet des résolutions de la Haye. La circulaire de convocation (10 décembre) était signée de vingt-deux membres du Conseil, parmi lesquels Hales, Jung, Mottershead, Roach, Mayo, Bennett. Les membres formant la minorité, Dupont, Lessner, Vickery, et quelques autres, se séparèrent alors de leurs collègues ; et ces sécessionnistes, après s’être arrogé (12 décembre) le titre de Conseil fédéral anglais, publièrent une contre-circulaire où il était dit que la convocation d’un Congrès anglais, pour discuter les décisions du Congrès de la Haye, était illégale. Une seconde contre-circulaire, disant les mêmes choses, fut publiée sous le nom de la « Section étrangère de Manchester[3] ». Mais le 23 décembre la majorité

  1. Voir t. II, p. 315.
  2. Voir plus loin pages 33-34.
  3. Une lettre de Marx à Sorge, du 21 décembre 1872, qu’on trouvera plus loin, nous a appris que la première de ces deux contre-circulaires était l’œuvre de Marx lui-même, et la seconde l’œuvre d’Engels.