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considère comme pouvant seuls sauver les peuples des crises économiques, des guerres nationales, des luttes religieuses, et fonder le règne de la liberté et de l’égalité pour tous.


Enfin, le 8 octobre, une étude sur le socialisme en Allemagne, publiée par Émile de Laveleye dans la Revue des Deux Mondes, fut commentée en ces termes par le Bulletin :


Un triomphe du socialisme.

L’économie politique vient, par l’organe d’un de ses maîtres les plus autorisés, de baisser pavillon devant le socialisme scientifique et de s’avouer vaincue.

Nous n’exagérons rien, on va le voir.

M. E. de Laveleye, dont nous avons mentionné précédemment (Bulletin du 4 mars 1876) les remarquables travaux sur la propriété (où il avait déjà fait des aveux très compromettants pour l’économie politique officielle), a publié dans la Revue des Deux Mondes du 1er septembre 1876 une étude sur le socialisme en Allemagne. Le morceau capital de cette étude est une analyse de la théorie économique de Karl Marx ; et, comme nos lecteurs le savent, cette théorie n’est autre chose que le programme socialiste admis par l’Internationale tout entière, dès le jour où au Congrès de Bâle, en 1869, elle a proclamé la nécessité de l’établissement de la propriété collective.

Il y a sans doute, dans les théories de Marx, des choses qui lui sont spéciales, et sur lesquelles il y a dissidence complète entre lui et de nombreux socialistes : nous voulons parler du moyen qu’il recommande pour opérer la transformation de la propriété (conquête du pouvoir politique par la classe ouvrière[1]), et de l’organisation de la propriété collective et des services publics, qu’il conçoit d’une autre façon que les socialistes fédéralistes et anti-gouvernementaux. Mais ces points-là sont tout à fait en dehors du débat tel que le soulève M. de Laveleye : il ne s’agit en effet, pour l’économiste de la Revue des Deux Mondes, que de cette partie des théories de Marx qui est commune à tous les socialistes contemporains, et qui appartient à Lassalle, à Bakounine, à Tchernychevsky aussi bien qu’à l’auteur du livre das Kapital. Les questions que M. de Laveleye examine sont celles de la définition de la valeur, de la loi des salaires, et de la formation du capital : et, nous le répétons, sur ce terrain, tous les socialistes sont unanimes. Le jugement que M. de Laveleye porte sur la théorie de Marx s’applique donc en réalité au socialisme moderne dans son ensemble.

Eh bien, ce socialisme, que des journalistes, dont l’ignorance n’est égalée que par l’effronterie, essaient de persifler comme un enfantillage ou de dénoncer à l’indignation publique comme un crime, ce socialisme de l’Internationale, M. de Laveleye déclare qu’il est fondé de la manière la plus solide et la plus rigoureusement scientifique sur les principes posés par les pères de l’économie politique.

Nous citons textuellement ses paroles :

  1. Notre programme à nous est la destruction du pouvoir politique. (Note du Bulletin.)