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que six mois après, par l’analyse que le Vpered de Londres publia du compte-rendu officiel de cette Conférence. Voici le résumé qu’en donna le Bulletin (numéro du 18 février 1877) :

« La Conférence était composée comme suit : dix membres du Conseil général, et quatorze délégués de ce qui s’appelait la « Fédération nord-américaine » ; des délégués d’autres Sections internationales des États-Unis, qui avaient eu la naïveté de se présenter, ne furent pas admis. Un socialiste allemand, M. Otto Walster, récemment émigré en Amérique, était censé représenter les socialistes d’Allemagne ; et des mandats avaient été envoyés de Zürich et de Genève par Greulich et J.-Ph. Becker. Le secrétaire du « Conseil général », Schneider, lut à la Conférence un rapport officiel sur la situation de « l’Internationale » (c’est-à-dire des adhérents du « Conseil général ») : cette situation fut dépeinte comme très affligeante ; le « Conseil général » exprimait l’opinion « que l’Association ne doit pas être considérée comme existante, tant que sa reconstitution ne sera pas possible en France, et jusqu’à ce que les représentants réels (actual) des ouvriers en Allemagne manifestent le désir effectif d’y prendre part ». Le « Conseil général » ajoutait qu’il n’avait point reçu de cotisations depuis plusieurs années, autre preuve que « l’Internationale » n’existait plus. Il concluait en proposant la résolution suivante : Attendu que la situation politique de l’Europe met provisoirement obstacle à la reconstitution des liens extérieurs de l’Association, nous déclarons que le Conseil général de l’Association internationale des travailleurs est dissous. Cette résolution fut adoptée à l’unanimité. »

Trente ans après, Sorge a écrit ce qui suit (p. 149 de son volume) sur cet épilogue de la burlesque histoire du « Conseil général de New York » :


Au milieu de juillet 1876 se réunit la Conférence de l’Association internationale des travailleurs. D’Europe il n’était venu personne. Les Allemands avaient seulement désigné Walster comme leur délégué ; les Suisses[1] avaient envoyé des mandats, mais qui n’arrivèrent qu’après la clôture des travaux. Le rapport du Conseil général fut adopté, ainsi que la proposition faite par lui de suspendre pour un terme indéfini l’organisation de l’Association internationale des travailleurs (die Organisation der Internationalen Arbeiterassoziation auf unbestimmte Zeit zu vertagen).


Sorge explique ensuite que les adhérents américains du Conseil général fusionnèrent avec le groupe des « Sozialdemokraten » et avec la « Illinois-Arbeiterpartei » pour former une organisation allemande sous le nom de « Arbeiterpartei der Vereinigten Staaten » (Parti ouvrier des États-Unis). Le premier acte du nouveau parti fut de prescrire à ses adhérents de s’abstenir de toute participation aux élections (vorläufig wurde den Parteiangehörigen dringend Wahlenthaltung empfohlen) : le marxisme américain aboutissait donc à cette abstention électorale dont la pratique — avait dit Hepner au Congrès de la Haye — « conduit directement au bureau de police » !


Deux grandes solennités organisées par la bourgeoisie suisse nous furent une occasion bienvenue d’opposer hautement les principes de l’Internationale aux vieux préjugés chauvins, aux haines nationales et à l’esprit militaire.

La première fut la célébration, par un « cortège historique », le 22 juin 1870, du quatrième centenaire de la « glorieuse » journée de Morat (22 juin 1476), où le patriciat vénal qui régnait sur les huit cantons suisses d’alors fit exterminer, par les brutes armées qu’il mettait, à prix d’or, au service des tyrans voisins, les troupes de l’ennemi du roi de France, le duc de Bourgogne Charles le Téméraire. Le Bulletin (9 juillet) publia ce qui suit au sujet de cette manifestation d’orgueil patriotique :

  1. Becker et Greulich, deux « Suisses » d’Allemagne.