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ciens membres de l’ex-Fédération romande, se proposait d’entreprendre prochainement, à ses risques et périls, la publication d’un journal en langue française ; et il demanda au nom de ce groupe que l’Arbeiterbund accordât à cette entreprise son appui moral et financier. Là-dessus, plusieurs délégués dirent que cette publication leur paraissait superflue ; qu’il existait dans la Suisse française un organe socialiste, le Bulletin de la Fédération jurassienne ; que cet organe, bien que certaines coteries dans l’Arbeiterbund voulussent avoir l’air d’ignorer systématiquement son existence, rendait de grands services ; et ils demandèrent que le Congrès de l’Arbeiterbund se bornât à recommander aux membres de cette association la propagation du Bulletin.

Nous l’avouons, nous avons été surpris de rencontrer ces sympathies inattendues parmi les délégués de l’Arbeiterbund ; ce fait nous réjouit et nous prouve qu’un rapprochement sensible s’est opéré entre la fraction avancée de l’Arbeiterbund et l’Internationale.

Greulich a combattu la proposition faite en faveur du Bulletin : tout en déclarant professer la plus haute estime pour la loyauté et le dévouement des internationaux de la Fédération jurassienne, il a dit qu’au point de vue politique leur pratique était trop différente de celle de l’Arbeiterbund pour que leur organe pût être recommandé par cette association.

Quelques délégués demandèrent qu’un membre de la rédaction du Bulletin, James Guillaume, qui assistait à la séance, fût entendu. James Guillaume, ayant reçu ainsi la parole sans l’avoir demandée, remercia ceux des délégués qui avaient exprimé leur sympathie pour le Bulletin ; il prit acte du témoignage rendu par Greulich à la Fédération jurassienne, et déclara comprendre parfaitement les scrupules que certains membres de l’Arbeiterbund peuvent avoir à mettre entre les mains des ouvriers un organe qui ne partage pas leur manière de voir quant à la pratique politique. Pour nous, a-t-il ajouté, nous n’avons pas de scrupules de ce genre, et nous n’hésitons pas à recommander aux ouvriers de langue allemande la lecture de la Tagwacht, parce que nous savons que c’est là pour eux une préparation nécessaire, et que nous considérons l’Arbeiterbund, malgré ses imperfections, comme l’école qui doit amener un jour les ouvriers de la Suisse allemande à l’Internationale.

Le Congrès déclara ensuite accepter l’offre faite par le groupe de socialistes (?) genevois, dont le journal, paraît-il, défendra un programme politique analogue à celui de l’Arbeiterbund.

... Nous espérons que le mouvement d’idées qui s’opère, chez certains groupes ouvriers de langue allemande, dans le sens d’une acceptation toujours plus complète des principes de l’Internationale, continuera à s’accentuer, et qu’un moment viendra où il n’y aura plus en Suisse deux organisations rivales, l’Arbeiterbund et la Fédération jurassienne, mais deux organisations sœurs et unies par les liens d’une étroite solidarité : la Fédération des ouvriers de langue allemande et la Fédération des ouvriers de langue française, marchant l’une et l’autre sous le drapeau de l’Association internationale des travailleurs.


À Lausanne, sous l’influence de Kahn et de Reinsdorf, on constatait une agitation assez bruyante ; toutefois le mouvement était plutôt de surface, il n’y