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sociale, et un journal hebdomadaire, l’Économie sociale, se fondait pour en publier le compte-rendu.

À Noël eut lieu à Verviers le Congrès de la Fédération belge. Ainsi qu’il avait été décidé en mai au Congrès de Jemappes, le Conseil régional fut placé pour 1870 à Anvers, et la Fédération eut désormais deux organes officiels, le Werker (en flamand) à Anvers et le Mirabeau à Verviers.


En Grande-Bretagne, le huitième Congrès des Trade Unions se réunit du 11 au 10 octobre à Glasgow (Écosse) ; notre correspondant (P. Robin) signala l’optimisme étonnant du secrétaire du Comité parlementaire : ce fonctionnaire avait osé dire que, grâce aux récents travaux du Parlement, les ouvriers n’étaient plus soumis à un code exceptionnel, et que l’œuvre de l’émancipation était pleine et complète, — phrase qui ne laissa pas de soulever des protestations ; un des cinq ébénistes qui avaient fait un mois de prison déclara tenir de bonne source qu’il pourrait être enfermé pour le même motif aussi bien sous la nouvelle loi que sous l’ancienne. M. Macdonald, député ouvrier, essaya, dans un toast porté au banquet, de justifier l’existence de la Chambre des lords, ce qui provoqua des éclats de rire ironiques ; mais quant à la Chambre des Communes, le Congrès, la jugeant un instrument utile à employer, vota une résolution disant qu’il était du devoir des Trade Unions de saisir toute occasion d’envoyer au Parlement des hommes de leur classe.


En Allemagne, à signaler des perquisitions à Berlin chez divers socialistes, et un grand discours de Liebknecht au Reichstag, disant que les triomphes militaires et diplomatiques remportés par les hommes d’État allemands avaient abouti au plus lamentable fiasco, et placé l’Allemagne dans la situation la plus précaire et la plus embarrassée où elle se fût jamais trouvée. Le Bulletin ne ménagea pas les éloges à ce discours, « où la politique bismarckienne était flagellée de main de maître ».


En Autriche, seize ouvriers qui, pour avoir pris part au Congrès socialiste de Marchegg, avaient été poursuivis sous l’inculpation de participation à une société secrète, furent acquittés (octobre) par le tribunal de Brunn. À Gratz, le Dr  Tauchinsky et quelques autres socialistes, inculpés de haute trahison, furent condamnés (décembre) à des peines légères, après des débats qui montrèrent en Tauchinsky un intrigant, qui avait cherché à entrer en relations avec le comte Hohenwart, chef du parti clérical : « Tauchinsky — écrivit la Tagwacht — n’est plus pour le socialisme qu’un homme mort, tout comme Oberwinder[1], qui avait voulu, lui, vendre les ouvriers aux libéraux. Les intrigues au moyen desquelles toute sorte de coquins ont réussi depuis des années à égarer les crédules et confiants ouvriers de l’Autriche sont un triste exemple de la corruption qui règne dans ce pays, où un grand et beau mouvement ouvrier s’est trouvé trahi et paralysé par des gredins. »


En Danemark, les membres de vingt-sept associations ouvrières de Copenhague, émus des souffrances endurées par les déportés de la Commune en Nouvelle-Calédonie, voulurent essayer d’intervenir en leur faveur : ils adressèrent, le 30 septembre, au ministre de France en Danemark une « protestation énergique et indignée contre la manière révoltante dont la France traite ces malheureux prisonniers », en lui demandant de la faire parvenir à son gouvernement. Si l’on pouvait critiquer le mode employé pour cette démarche, le sentiment qui l’avait dictée faisait honneur aux ouvriers danois, et le Bulletin (7 novembre) publia in-extenso leur protestation.


En Grèce, un journal socialiste, l’Ergatis (Ἑργἅτης, le Travailleur), rédigé par P. Panas, venait de voir le jour à Athènes (décembre). Quoique ce journal fût d’un socialisme encore très hésitant, et parût préoccupé surtout de questions parlementaires, le Bulletin lui adressa un souhait de bienvenue et accepta de faire l’échange avec lui.

  1. Le héros du Congrès marxiste de Genève de 1873.