Page:James Guillaume - L'Internationale, III et IV.djvu/315

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

comme plusieurs autres de nos amis, qu’il y aurait quelque chose à faire en Hertségovine (voir à la page suivante), il s’y rendit, et y fit un séjour assez prolongé, au sujet duquel je n’ai pas de renseignements précis. À cette époque (entre l’automne de 1875 et le printemps de 1876), il fit aussi un voyage en Espagne, dans l’intention de faire évader Alerini, alors détenu à Cadix ; mais la tentative n’aboutit pas.

Dans le courant d’août, les journaux socialistes italiens publièrent une déclaration datée du 15 août 1875 et signée du nom de quatre ouvriers qui avaient été jusqu’alors les tenants et les dupes du mouchard Terzaghi (Alfonso Danesi, Gaetano Didimi, Cesare Cesari et Lodovico Cattani) ; ils y annonçaient avoir rompu toute relation avec ce personnage, « parce que nous avons maintenant connaissance de faits et de documents qui prouvent qu’il est précisément tel que l’avaient déjà affirmé d’autres personnes qui l’ont connu avant nous ».


En France, les ouvriers parisiens s’occupaient des moyens d’envoyer une délégation ouvrière à l’Exposition universelle de Philadelphie, en 1876. Les chambres syndicales élurent à cet effet une commission de travail, qui se subdivisa en plusieurs sous-commissions, et qui nomma (22 septembre) une commission de contrôle chargée de veiller à l’exécution du règlement.

Pendant ce temps, les déportés de la Nouvelle-Calédonie continuaient à expier, là-bas, le crime d’avoir voulu émanciper le peuple français. Un groupe de proscrits socialistes publia, en feuilles volantes, pour tâcher de réveiller la conscience du prolétariat français et celle du public européen, des lettres et des fragments de lettres écrites par des déportés, et précédées d’une préface (rédigée, je crois, par Élisée Reclus) que le Bulletin reproduisit (no 42). Cette préface disait : « Il se commet un crime, et de ce crime vous êtes responsable… La Nouvelle-Calédonie est un abattoir d’hommes… Si vous avez en vous quelque bonté, quelque justice, vous agirez en ce qui vous concerne, ne serait-ce qu’en protestant dans votre coin, ne serait-ce qu’en racontant ce qui se passe. Et pour vous renseigner, vous lirez ces fragments de lettres que voici, et qui seront suivis de plusieurs autres ; vous réfléchirez… Nous avons parlé, parce que notre conscience nous l’ordonne. Il nous faut crier, il nous faut dénoncer le crime ; nous le voyons, nous l’entendons par delà les barrières des Alpes, par delà les horizons lointains ; nous les contemplons, ces figures tristes et fiévreuses ; notre regard rencontre ces regards douloureux… ; nous distinguons les soupirs étouffés des condamnés, les jurons affreux des garde-chiourmes, les fouets qui cinglent les épaules et meurtrissent les flancs de nos frères et amis… Car, nous sommes fiers de le dire, nous aussi nous sommes de ces gens-là ! »


En Belgique, on signala plusieurs grèves importantes dans l’été de 1875, entre autres celle des bouilleurs du Borinage, près de Mons, qui s’étendit à vingt mille ouvriers, et celle des bouilleurs de Flémalle-Grande, près de Liège. Ces derniers, n’ayant aucune organisation, succombèrent ; mais l’insuccès ouvrit les yeux de ces travailleurs, qui se mirent en relations, ainsi que tous les mineurs du bassin de Seraing, avec la Section internationale de Liège. « La Section liégeoise, écrivait l’Ami du peuple (journal socialiste de Liège), ne peut suffire à toutes les demandes de séances, meetings, etc., pour aller organiser les mineurs. On a déjà reçu des inscriptions par centaines à l’Internationale ; deux comités sont en formation, et nous espérons qu’une organisation ouvrière va se faire nombreuse et rapide, pour que la revanche des ouvriers ne se fasse pas longtemps attendre. »

À Bruxelles, une « Chambre du travail » s’était fondée ; une lettre adressée au Bulletin (no 27) nous disait : « Elle comprend déjà treize sociétés de métier, parfaitement organisées pour la résistance et l’étude des questions sociales ; elle se propose de créer un organe sous peu. Quelques-unes des sociétés composant cette Chambre du travail font partie de l’Internationale ; les autres, quoique n’en faisant pas partie, nous sont sympathiques et professent les mêmes principes que nous. »

Le Congrès annuel de la fédération des ouvriers marbriers, sculpteurs et tail-