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samedi soir, un certain nombre de membres de la section s’étaient trouvés, par cette circonstance, fréquemment empêchés d’assister à ses réunions »), avait communiqué au Comité fédéral jurassien un projet de nouvel agrandissement du format du Bulletin, à partir du 1er janvier 1875 : ce projet « démontrait qu’au prix de sacrifices relativement minimes, et qui seraient promptement compensés par une augmentation du nombre des abonnés, le Bulletin, qui contenait 500 lignes en moyenne, pourrait être transformé en un journal à trois colonnes contenant 900 lignes, le prix de l’abonnement restant le même » ; la Section proposait en outre de modifier le titre de l’organe fédéral, et de l’appeler l’Égalité, en souvenir du journal fondé à la fin de 1868 et qui avait, le premier en Suisse, défendu les idées révolutionnaires de l’Internationale. Les Sections n’adoptèrent pas la proposition de changer le titre de leur journal, mais elles votèrent à l’unanimité l’agrandissement de son format, qui fut officiellement annoncé, en tête du numéro du 22 novembre 1874, pour le 1er janvier suivant.

Au Val de Saint-Imier, le Comité central de la Fédération ouvrière étudiait les moyens d’instituer un second magasin coopératif ; il adressait des invitations à divers socialistes connus pour les engager à venir donner au Vallon des conférences ; une assemblée générale de l’Union des Sections internationales du district de Courtelary, réunie le 16 novembre, décidait d’organiser des séances mensuelles publiques de discussion, qui se tiendraient alternativement à Saint-Imier et à Sonvillier ; la première eut lieu le lundi 14 décembre, à l’hôtel de la Clef, à Saint-Imier ; le sujet traité fut « La réduction des heures de travail et la question des salaires ». Le 22 novembre, une assemblée des ouvriers faiseurs d’échappements et parties annexes se réunit à Saint-Imier, sur l’invitation de la Fédération ouvrière, pour constituer une société de métier ; la Société des faiseurs d’échappements de Moutier avait envoyé un télégramme de sympathie ; le 21 décembre, le Bulletin put annoncer que les faiseurs d’échappements du Vallon avaient définitivement fondé leur société, et que, de concert avec ceux de Moutier, ils allaient établir une fédération de métier.

Deux assemblées de la Fédération ouvrière de la Chaux-de-Fonds avait eu lieu, le 6 et le 27 novembre, pour s’occuper de la création d’une société coopérative de consommation et en discuter le règlement, qui fut adopté. Pas plus à la Chaux-de-Fonds qu’à Saint-Imier on ne voyait dans la coopération une arme efficace pour la lutte contre l’exploitation capitaliste ; mais on entendait s’en servir comme d’un moyen de grouper les ouvriers par l’attrait de quelques avantages immédiats, avec l’espoir qu’il serait possible de faire entrer graduellement dans leur esprit des idées socialistes.

Nous nous intéressions toujours vivement à la situation des combattants de la Commune déportés en Nouvelle-Calédonie, et notre Bulletin publiait fréquemment de leurs nouvelles. À diverses reprises, des sommes d’argent avaient été recueillies dans nos Sections, et transmises aux déportés, comme je l’ai dit, par l’intermédiaire d’Élisée Reclus. En juillet 1874, il se trouva, je ne sais pour quelle raison, que Reclus n’eut plus à sa disposition le moyen dont il s’était servi jusqu’alors pour ses envois ; il en prévint le Comité fédéral jurassien. On lit dans les procès-verbaux de ce Comité : « 3 août 1874. Une lettre d’Élisée Reclus annonce qu’il ne peut plus faire parvenir d’argent aux déportés, mais qu’il pourrait en faire parvenir aux détenus en France. Baudrand croit que l’on devrait s’adresser à Henri Rochefort ; cette proposition est repoussée. — 24 août. Le Cercle d’études sociales du Locle est d’avis d’envoyer l’argent destiné aux déportés aux détenus de la prison d’Embrun[1]. — 7 septembre. Graisier fait savoir que, d’après des renseignements du compagnon Pindy, l’on

  1. Il y avait eu et il y avait encore à la prison d’Embrun un assez grand nombre de condamnés de la Commune ; parmi eux s’était trouvé entre autres le bijoutier Colleau (plus tard gérant du journal le Prolétaire, à Paris), qui, fait prisonnier le 4 avril 1871 sur le plateau de Châtillon, avait été envoyé sur les pontons en compagnie d’Élisée Reclus, et avait été condamné ensuite à cinq ans de détention. Il était resté en correspondance avec Reclus.