Page:James Darmesteter - Coup d oeil sur l histoire du peuple juif, 1882.djvu/31

Cette page a été validée par deux contributeurs.

siècles, le sentiment de la grande unité et une inquiétude de charité et de justice. Le règne de la Bible, et des Évangiles en tant qu’ils s’inspirent d’elle, ne pourra que s’affermir à mesure que les religions positives qui s’y rattachent perdront de leur empire. Les grandes religions survivent à leurs autels et à leurs prêtres : l’hellénisme aboli a moins d’incrédules aujourd’hui qu’aux jours de Socrate et d’Anaxagore ; les dieux d’Homère se mouraient quand Phidias les taillait dans le Paros : c’est à présent qu’ils trônent vraiment dans l’immortalité, dans la pensée et le cœur de l’Europe. La croix a beau tomber en poussière : il est quelques paroles, prononcées à son ombre en Galilée, dont l’écho vibrera à toute éternité dans la conscience humaine. Et quand le peuple qui a fait la Bible s’évanouirait, race et culte, sans laisser de trace visible de son passage sur la terre, son empreinte serait au plus profond du cœur des générations qui n’en sauront rien, peut-être, mais qui vivront de ce qu’il a mis en elles. L’humanité, telle que la rêvent ceux qui voudraient qu’on les appelât des libres-penseurs, pourra renier des lèvres la Bible et son œuvre : elle ne pourra la renier de cœur sans arracher d’elle-même ce qu’elle a de meilleur en elle, la foi en l’unité et l’espérance en la justice, sans reculer dans la mythologie et le droit de la force de trente siècles en arrière.


FIN


PARIS. — IMP. P. MOUILLOT, 13-15, QUAI VOLTAIRE. — 26702.