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pas à plonger de nouveau dans l’obscur et abominable abîme ? Eh bien ! après quelque temps, une espèce de réponse se fit entendre ; et j’en trouvai la confirmation dans la perception aiguisée de ce qu’il y avait d’exceptionnel chez mon petit compagnon — et qui me frappa au point de n’en pouvoir douter, lorsqu’il me rejoignit. Il semblait vraiment qu’il eût trouvé, à cette heure même, comme il l’avait si souvent fait à ses heures de travail, encore une nouvelle et délicate manière de faciliter nos rapports. Ce fait, qui se manifesta dans notre solitude à deux avec un rayonnement particulier encore jamais atteint, n’apportait-il pas la lumière ? Ce fait qu’il serait absurde — puisque l’occasion, la précieuse occasion, était enfin là — de mépriser, auprès d’un enfant ainsi doué, le secours qui pouvait être arraché à sa souveraine intelligence ? Pour quelle fin son intelligence lui avait-elle été donnée, sinon pour son salut ? N’était-il pas licite, pour atteindre son esprit, de risquer un coup de main hardi sur son honneur ? Face à face dans la salle à manger, c’était, littéralement, comme s’il me montrait le chemin. Le rôti de mouton était sur la table, et j’avais congédié tout service. Miles, avant de s’asseoir, resta un instant debout, les mains dans les poches, regardant le rôti, à propos duquel il sembla prêt de faire quelque joyeuse plaisanterie. Mais ses paroles furent celles-ci :

« Dites-donc, ma chère, est-elle vraiment si malade ?

— La petite Flora ? Pas si malade qu’elle ne puisse bientôt se sentir beaucoup mieux. Londres la remettra. Bly ne lui convenait plus. Venez donc manger votre mouton. »

Il m’obéit, alertement, posa soigneusement son assiette devant lui, et quand il fut installé, continua :

« Est-ce que Bly est devenu si mauvais tout d’un coup ?

— Pas si subitement que vous pourriez croire. On voyait cela venir depuis quelque temps.

— Alors pourquoi ne l’avez-vous pas fait partir avant ?