t-il d’une voix plus enrouée, vous ne savez pas combien je vous aime, combien je vous admire, combien je suis dévoué à l’école Saint-Louis-de-Gonzague, parce que c’est une grande œuvre de foi, dans un temps pourri, achevé, qui ne croit plus à rien… Vous êtes mon maître, je suis fier d’être votre disciple et de le dire ! Et quand je vois que votre bonté, votre confiance vous égarent, quand je vois…
Mathenot, suffoqué, se tut. Cet homme rude, brutal et cassant, avait des larmes dans les yeux. Cette émotion troubla l’abbé Barbaroux.
— Mon cher Mathenot, dit-il, d’une voix radoucie, je ne vous soupçonne pas de jalousie, je vous connais trop pour cela I Excusez-moi si je suis allé trop loin dans mes expressions. Mais la surprise a été si forte… La Providence ne m’abandonnera pas, elle m’inspirera un moyen de connaître la vérité. Je ne méprise pas votre avis, je prendrai mes renseignements.
Mathenot se retira. Il espérait bien que l’abbé Barbaroux apprendrait l’infamie d’Augulanty. Quelle reconnaissance alors il aurait pour l’homme qui l’avait débarrassé d’un tel hypocrite ! Mathenot, emporté par son imagination, se voyait déjà économe.
XIII
OÙ LA VERTU DE MONSIEUR AUGULANTY TRIOMPHE
Le lendemain, à table, les pensionnaires remarquèrent l’extraordinaire distraction de l’abbé Barbaroux. Il était généralement inattentif, mais ce jour-là, sa figure concentrée et contractée indiquait l’importance de ses préoccupations. En vérité, le rapport de Mathenot causait à Barbaroux une souffrance intolérable. Le doute était une maladie réelle pour cet homme qui aimait à croire, comme certaines femmes aiment à aimer. Il avait beau se répéter que ce qu’on lui avait raconté n’était qu’une indigne calomnie, il ne laissait pas que d’en être douloureusement impressionné. Le caractère ecclésiastique de Mathenot