— Cette nuit, je ne dormais pas… Je veillais… J’ai entendu une porte… qu’on ouvrait, j’ai cru que c’était celle de la maison, puis j’ai entendu une voiture automobile, je me…
Augulanty l’interrompit.
— Une voiture automobile ! C’est bien cela ! Il en avait une, cet individu !
— Qui ? questionna Barbaroux.
— Mais Sylvestre Legoff, donc, celui qui a enlevé votre nièce !
— C’est… Sylvestre Legoff ?
— Oui. Vous le connaissez ?
— Non… ou plutôt si… Je savais seulement…
Augulanty l’interrompit de nouveau.
— Saviez-vous qu’il connût Virginie ?
— Non… Mais, dit plus nettement Barbaroux, qui commençait à prendre conscience de ce qui se passait autour de lui et qui s’étonnait de cet interrogatoire, comment se fait-il, Augulanty, que ce soit vous qui m’informiez de tout cela ?
Augulanty commença aussitôt à baisser pavillon.
— Mon Dieu, monsieur l’abbé, c’est Mme Pioutte qui m’en a chargé… Quand je suis arrivé, comme chaque jour, pour assister à la célébration du saint sacrifice de la messe, j’ai trouvé votre sœur, qui m’attendait. Elle avait l’air si accablée que je lui ai demandé aussitôt de nos nouvelles. C’est alors qu’elle m’a tout raconté. Ce matin, à l’heure habituelle du lever de Mlle Virginie, elle ne l’a pas entendue remuer, elle est allée frapper à sa porte, personne n’a répondu ; elle est entrée, l’appartement était vide, et tous les objets de toilette, chapeaux, robes, souliers, avaient disparu. Sur la commode, il y avait une lettre bien en vue où Mlle Virginie lui annonçait son départ avec M. Legoff. Elle avait assez de la vie qu’elle menait, dit-elle…
Ce qu’il ne racontait pas, ce digne M. Augulanty, c’était sa surprise, sa colère, son indignation. Ce départ imprévu de Virginie, en déjouant ses plans, le rejetait dans la misère d’où il espérait sortir par ses diplomaties et ses bassesses. En fuyant ainsi, elle lui volait son avenir.