J’ai cherché un moyen d’y remédier. Je crois l’avoir trouvé. Il s’agit, n’est-ce pas, de découvrir une source de revenus qui vienne équilibrer ton budget. Me Lacreu m’a donné un bon conseil. Tu connais Sanary, ce joli port de pêche, abrité du vent, et qui est à quelques heures d’ici ? Des spéculateurs sont en train de fonder une société pour y acheter des terrains et en faire une station balnéaire. On va bâtir des villas, construire un casino, commencer une réclame monstre et entamer une concurrence sérieuse avec Cannes, Nice, Saint-Raphaël, Hyères. Si on pouvait trouver quelque chose à y acheter maintenant, ce serait une affaire d’or. Me Lacreu m’a proposé une jolie villa de trois étages, avec un jardin et une habitation de paysan, tout près de la mer. On la céderait pour trente mille francs.
— Eh bien ? dit l’abbé.
— Achète-la !
— Mais je n’ai pas d’argent ! Et à quoi cela me servirait-il ?
— Tu n’es pas pratique, mon bon Théodore. Ah ! si mon pauvre mari vivait encore, quelles belles affaires il réaliserait là-dessus ! Écoute. Sanary sera une station très renommée où les Anglais et les malades viendront passer l’hiver. Nous trouverions facilement des locataires. Nous la louerions bien deux mille francs, étage par étage. Tu aurais donc l’intérêt de ton argent. Et quel intérêt ! Presque le sept pour cent !
— Mais tu ignores donc où j’en suis ? Où prendrai-je cet argent ?
— Et ta maison ? Elle vaut soixante mille francs. Fais prendre une nouvelle hypothèque. Me Garoutte t’en trouvera facilement une. Mettons que tu aies à payer un intérêt de neuf cents francs, tu en toucheras deux mille ! De plus, je compte faire un restaurant de la petite maison installée pour cela. Nos locataires y prendraient pension, d’autres viendraient également.
— Mais qui tiendrait ce restaurant ?
— Moi-même, je te laisserai ici Virginie pour diriger la maison. Elle s’y entend aussi bien que moi, et j’irai surveiller celle de Sanary. Nous gagnerions là cinq à six cents francs par mois, au bas mot…