vanités du luxe, l’amour, les honneurs, les décorations que lui vaudraient ses études scientifiques, tout ce mélange d’ambitions vulgaires qui fermentait dans ce cœur d’humilié, avide de prendre sa revanche et de se montrer, un jour, l’égal de ceux qui l’avaient dédaigné. Mais cela, Virginie, seule, pouvait le lui apporter dans ses longues mains, fines comme des épées et blanches comme des jouets d’ivoire, et Virginie le lui refusait. Elle le condamnait à l’ombre, au travail obscur, méprisé, mal payé, à une existence plate, lugubre et médiocre. Elle l’effaçait d’un regard ; elle le rejetait au néant, d’un sourire. Elle ne voulait pas savoir ce que cet homme, affable jusqu’à la servilité et d’apparence lymphatique, contenait de passionné, d’ardent et d’audacieux. Mais, dans la frénésie de ses désirs, dans la violence exaspérée de son orgueil, de sa sensualité et de ses besoins d’argent, Augulanty se cramponnait fiévreusement à son projet comme un naufragé à une épave. Énervé, frémissant, bouillant d’impatience et de rancune, il se disait, tout en marchant sous la pluie cinglante, des monologues rageurs :
— Ah ! elle me refuse ! Ah ! elle est sûre de ne jamais m’aimer et de ne jamais m’épouser ! Je suis un trop petit sire pour elle ! On ne réduira donc pas l’effroyable fierté de tous ces riches, puisqu’il la conservent même quand ils sont ruinés et quand ils vivent aux crochets d’autrui ! Et cette Virginie s’imagine que cela va se passer comme ça, que je ne lutterai pas, que j’admettrai tout simplement d’être mis de côté, comme une vieille paire de pantoufles ! Ah ! Ah ! nous verrons, nous verrons. Mais que lui faut-il donc ? s’écria-t-il, intérieurement, avec une sorte de contraction affreuse de la gorge, un prince ou un Adonis ? Je ne suis pas assez riche, ni assez chic, ni assez beau pour elle, ni assez apparenté à de vieilles familles débarquant tout droit de l’époque tertiaire.
Ayant l’âme ulcérée et l’amour-propre douloureux comme une plaie que l’on excite avec un fer, M. Augulanty divaguait ainsi, en se dirigeant vers son lointain quartier.
Il reprit plus loin son monologue interrompu :
— Eh bien, puisqu’on me refuse, puisqu’on me trouve