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MYSTÉRIEUSES

roses embaumaient dans la nuit légère de juin. Tout reposait sur la place des Vosges. Je voyais mon avenir s’étendre devant moi comme une chose égale et lisse ; j’étais libre maintenant de ne pas me marier ; j’aurais un foyer, une famille, qui m’accompagnerait jusqu’à la mort, poussant, autour de mon enterrement, ses enfants en noir, ses gendres gémissants, ses pleureuses bien rétribuées. Mon amitié pour Martial allait se multiplier, émettre des bourgeons nouveaux. Quel printemps radieux ! Est-ce que les lilas blancs n’avaient pas grandi soudain, est-ce que leurs fleurs ne retombaient pas du ciel en grappes transparentes ? Je m’aperçus même, en regardant par la fenêtre, que quelques fleurs quittaient leurs branches invisibles et filaient à travers l’espace. Je pouvais faire un vœu, j’en avais le temps, celui que je formulais ne me sortant guère de l’esprit.