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LE RESTE EST SILENCE…

Son interlocutrice, fatiguée déjà de la discussion, qui, pourtant, n’était qu’à peine commencée, répondit avec une douceur ennuyée, plus irritante que des injures, dans son indulgence condescendante et voulue :

— Je vous ai déjà dit cent fois que rien n’est plus commun que de s’habiller aujourd’hui. Je ne tiens pas à avoir l’air endimanché des petites ouvrières et des commises, qui sortent, ce jour-là, ce qu’elles ont de mieux… Ça ne m’amuse déjà pas tant que cela d’aller me traîner le dimanche sur ces promenades publiques ; je l’accepte sans plaisir, mais enfin je l’accepte, parce que vous y tenez… Laissez-moi, au moins, choisir ma robe…

— Ça t’amuse peu, Jeanne, de sortir avec ton mari et ton enfant, dit mon père, en fronçant ses gros sourcils d’un air sévère ; je voudrais bien savoir ce qui t’amuse… Écoute, Jeanne, tu as « quelque chose ? »

Ma mère eut un rire forcé :

— Quoi ? Que veux-tu que j’aie de si extraordinaire ?