Page:Jaloux - Le reste est silence, 1910.djvu/78

Cette page a été validée par deux contributeurs.
68
LE RESTE EST SILENCE…

monte sans cesse contre Léon et contre moi… Je suis moins maîtresse dans ma propre maison que ma belle-sœur, et vous lui donnez toujours raison contre nous, quoi qu’il arrive… Je ne vous dis pas sans cesse que je n’aime pas cette façon d’agir, je la subis et je me tais. Imitez-moi et ne me cherchez pas querelle, ou, je vous le jure, il y a beaucoup de choses que je ne supporterai plus… Il est entendu que je suis jeune, que je suis coquette et que j’ai une cervelle d’oiseau, mais ne me le rappelez pas trop, Joseph, ou cela ne nous vaudra rien ni aux uns ni aux autres… Vous m’avez encore pris un livre, ce matin, et vous ne me le rendrez pas. C’est déjà le quatrième qui disparaît ainsi…

Mon père rougit et regarda scrupuleusement son assiette :

— J’ai jugé qu’il n’était bon qu’à te monter la tête et à te fausser l’imagination.

Ma mère répliqua hardiment :

— Ma tête est à moi, je pense, et mon imagination aussi. Et vous n’aurez rien à y voir, jamais. Est-ce que vous avez pensé,